15 -
LŽgislatives du 2 janvier 1956
Les Žlections brusquŽes suite aux
renversements successifs des gouvernements MENDéS FRANCE (5/2/1955), puis Edgar
FAURE (2/12/1955), ˆ une forte majoritŽ, conduit ce dernier ˆ dissoudre
l'AssemblŽe nationale (mesure exceptionnelle et qui dramatise le dŽbat) (1).
C'est dans le contexte du drame algŽrien
et du rappel du contingent (2), de la contestation des petits commerants et
artisans, mais aussi du clivage politique au sein du Parti Radical entre gauche
(P. MENDéS FRANCE) et droite (E. FAURE), que se dŽroule cette consultation
Žlectorale.
Le
mode de scrutin, qui n'a pu tre rŽformŽ selon le vÏu du PrŽsident du Conseil
(ce qui est l'une des causes de la dissolution), reste le mme (proportionnelle
avec apparentements).
Les reclassements politiques sont clairs
:
1- Le PCF reste isolŽ.
2- Le "Front rŽpublicain" qui
associe le Parti Socialiste SFIO, les radicaux dont le leader est MENDéS FRANCE
(E. FAURE Žtant exclu) (3), l'UDSR (que Franois MITTERRAND a reprŽsentŽ plusieurs
fois comme ministre dans divers
gouvernements depuis 1946), les RŽpublicains-sociaux (ex-RPF) avec
CHABAN-DELMAS.
3- Le MRP, les ModŽrŽs et IndŽpendants
et Paysans (CNIP) avec Antoine PINAY.
4- L'UDCA du dynamique Pierre POUJADE,
qui ˆ chaque meeting se dŽclare pour tous "ceux qui sont contre". . .
les dŽputŽs !, et dont l'essentiel du programme sera de "sortir les
sortants". Accessoirement de diminuer les imp™ts sans diminuer les
dŽpenses entra”nŽes par le maintien de l'ordre en AlgŽrie.
Les listes dŽpartementales reflŽteront
ces grands courants nationaux :
1 - La liste du PCF, conduite par son
dŽputŽ sortant AndrŽ TOURNƒ avec Gaston IGONET et Raoul VIGNETTES (SecrŽtaire
fŽdŽral).
Leur campagne est simple : arrt des
opŽrations militaires et nŽgociations en AlgŽrie, retour du contingent, et
naturellement dŽnonciation de la loi "inique" des apparentements, qui
leur avait cožtŽ si cher en siges de dŽputŽs en 1951.
2 - La liste socialiste est menŽe par le
dissident Arthur CONTE (dŽputŽ sortant), exclu de la SFIO . . . puis rŽintŽgrŽ,
suivi par Paul ALDUY (maire d'AmŽlie) et Paul JENSONS.
Leur campagne est aussi simple :
"contre les exŽcuteurs serviles des ordres d'un empire Žtranger",
reprenant ainsi la formule prtŽe ˆ tort Guy MOLLET " les communistes ne
sont pas ˆ gauche mais ˆ l'Est" (4). Mais aussi "contre les
rŽactionnaires et clŽricaux de la majoritŽ de D”en-B”en-Phu. Ce qui n'engage
pas ˆ grand chose (D”en-Bin-Phu c'est du passŽ, et les clŽricaux peu prŽsents
dans le dŽpartement).
Arthur CONTE jouit d'un incontestable
"culte" de la personnalitŽ (comme le rŽvlent les affichettes placŽes
hors des panneaux officiels qui invitent tous les Catalans qui ne sont pas fous
ˆ voter Arthur, l'aigle des PyrŽnŽes. . . orientales ). C'est aussi l'intellectuel
de la fŽdŽration catalane (dont les mauvaises langues diront plus tard qu'il
hantait davantage la bibliothque de l'AssemblŽe nationale que l'hŽmicycle.
L'aiglon se serait-il mŽtamorphosŽ au cours de ses mandats en rat. . . de
bibliothque ! (5). Je dois avouer que pour avoir visitŽ cette magnifique
bibliothque, renfermant outre le procs de Jeanne d'Arc, un Codex Aztque, on
peut excuser les tentations de l'ex-professeur d'histoire).
Rien n'empche apparemment un
apparentement avec les amis radicaux, et plus curieusement avec les
RŽpublicains sociaux de Paul JUNQUET (ex SFIO, ex RPF) dont la combativitŽ en
1951 Žtait apparue des plus faibles (lequel ne souhaite peut-tre pas comme
Michel DEBRƒ la mort du rŽgime).
3 - La liste du Parti Radical est
conduite par Gaston PAMS (qui a obtenu de la fŽdŽration dŽpartementale
l'Žviction de "l'anctre" et pourtant dŽputŽ sortant DELCOS), avec
Sylvain MAILLOLS (conseiller gŽnŽral de Millas) et le Dr AndrŽ PARCƒ (maire de
Banyuls). Un handicap toutefois, l'ambigu•tŽ vis-ˆ-vis de l'aide ˆ l'Žcole libre, trahissant son adhŽsion
au programme minimum du ComitŽ d'action la•que.
4 - La liste d'Union RŽpublicaine (CNI,
ARS, MRP) avec un avocat parisien "parachutŽ" Franois SUZANNE
(partisan de l'aide ˆ l'Žcole libre), SŽverin ESTIRACH (de Baixas) et Jacques
MAURY (maire de Villeneuve-des-Escaldes). Il sera remarquŽ que cette liste,
contrairement ˆ la prŽcŽdente, verra tous ses communiquŽs insŽrŽs dans
"l'IndŽpendant".
5 - L'UDCA de Pierre POUJADE est
reprŽsentŽe par la liste d'Union et FraternitŽ Franaise (UFF), conduite par
Alfred VALAT, orateur dŽpartemental du mouvement, Fernand RƒDARéS et Jean LORIDANT, respectivement prŽsident
et vice-prŽsident de l'UDCA dŽpartementale.
Leur programme est naturellement la dŽfense
des intŽrts des commerants et artisans contre les "politiciens
professionnels", les gouvernants "vŽnaux", et rŽclame la
convocation des ƒtats gŽnŽraux.
RŽsultats
:
Banyuls DŽpartement
MŽtropole
Inscrits:
2387 (+259 /1951) 146.820 26.774.899
Abst.: 417 (17,46%)
(22,27%) (17,20%)
Votants:
1970 (82,54%) (77,73%) (82,80%)
Blancs: 15 ( 0,76%) ( 1,84%) (
1,10%)
S.Expr.:
1955 (81,90%) (76,29%) (80,30%)
PCF: 522 (26,70% S.E) (34,75% S.E) (25,36% S.E)
SFIO: 303 (15,49% --) (26,74% --) (14,93%--)
Radic: 861 (44,04% --) (13,33% --) (10,99 %--)
Rep.soc: 9 ( 0,46% --) ( 0,86% --)
( 1,18 %--)
Un.Rep.: 161 (8,23% --) (12,86% --) (25,50 %--)
UFF: 84 (4,29% --)
(10,71% --) (11,60 %--)
Radicaux
(hors Front rŽpublicain) : 3,85% S.E ; Rep. soc (ex-RPF) hors Front rŽpublicain
: 2,69% S.E ; MRP : 10,88% S.E ; ModŽrŽs : 14,99% S.E ; Extrme droite : 1,20%
S.E .
Remarques :
Les trois Žlus du dŽpartement sont AndrŽ
TOURNƒ, et les deux socialistes Arthur CONTE et Paul ALDUY (pour la premire
fois, et ˆ 40 voix prs).
Contrairement ˆ 1951, le nombre des
inscrits a fortement augmentŽ, correspondant ˆ l'apparition d'une nouvelle
gŽnŽration (le vote est alors ˆ 21 ans) et un peu plus fort ˆ Banyuls (+10,95%)
que sur le plan national (+ 8,40%). C'est un nombre suffisamment important pour
modifier les Žquilibres politiques prŽcŽdents.
Les abstentions sont les plus faibles constatŽes pour
ce type d'Žlection, dŽmontrant l'intŽrt des Žlecteurs qui en ont parfaitement
peru l'enjeu. Elles sont Žquivalentes ˆ celles de la mŽtropole, et infŽrieures
ˆ celles du dŽpartement, ce qui s'explique aisŽment puisque l'un des candidats
est maire de Banyuls depuis trois ans.
Le PCF accro”t ses voix (+ 28), mais
faiblement, et ne profite pas des nouveaux inscrits, alors que sur le plan
national il progresse de 500 000 voix par rapport ˆ 1951 (25,9% S.E.)
retrouvant son score de 1946. Il obtient 151 dŽputŽs contre 103 en 1951.
Le Parti Socialiste SFIO ne retrouve pas
ˆ Banyuls ses voix de 1951 et recule nettement (-268), des Žlecteurs
"centristes" de 1951 s'Žtant sans doute reportŽs, en partie, sur la
liste radicale de leur maire.
Sur le plan national il gagne des voix
par rapport ˆ 1951, retrouve ˆ peu prs son score de novembre 1946, n'ayant
plus participŽ ˆ des gouvernements de centre droit. Il disposera de 95 dŽputŽs.
Le Parti Radical fait naturellement un
tabac ˆ Banyuls (+612), du jamais vu si l'on estime ˆ . . . 53 son score initial
le 21 octobre 1945. Il obtient ˆ 57 voix prs les Žlecteurs d'AndrŽ PARCƒ aux
municipales. Mais l'AssemblŽe nationale sera privŽe d'un excellent tribun et
dŽfenseur du Cru Banyuls, puisque le dŽpartement n'envoie aucun dŽputŽ radical
ˆ la chambre.
Dans le pays les radicaux (RGR + UDSR)
progressent en voix et retrouvent leur score de novembre 1946. Ils disposent de
57 dŽputŽs plus 19 (UDSR + RDA) et 14 (RGR).
L'Union RŽpublicaine, essentiellement
MRP et ModŽrŽs, gagnent 49 voix ˆ Banyuls. Au plan national si le MRP maintient
ses voix de 1951 (2 360 000) soit 11,1%, les ModŽrŽs les ont largement dŽpassŽs
avec 3 258 000 voix, soit 14,4% S. ExprimŽs. Ils disposent respectivement de 73
et 95 dŽputŽs.
Les RŽpublicains sociaux (gaullistes)
font un score ridicule ˆ Banyuls . . . 9 voix d'inconditionnels (dont sans
doute celle de Marie Ange PY). Dans le pays le recul est tout aussi
spectaculaire en perdant en une seule Žlection 3 283 141 voix ! passant de
20,4% S.E. en 1951 ˆ 4,4%, et de 121 dŽputŽs . . . ˆ 20. Mais le GŽnŽral s'est
apparemment dŽsintŽressŽ de la consultation comme de ses troupes, et accomplit
sa "traversŽe du dŽsert", mais certains de ses fidles, comme
CHABAN-DELMAS, frŽquentent assidžment les hommes du Front RŽpublicain.
La liste poujadiste crŽe la vŽritable
surprise, pour ne pas dire la stupŽfaction, non ˆ Banyuls o elle ne recueille que 84 voix, mais
dans le dŽpartement (12.000 voix,
presque autant que les radicaux !), et dans le pays , puisque, pour sa premire
apparition sur la scne politique, et sans notables connus, elle obtient 2 484
000 voix et 11,5% S.E. (plus que le parti Radical seul, ou le MRP). Ce sont 52
trublions qui entrent au Palais-Bourbon. Les invalidations de certains Žlus de
l'UFF seront considŽrŽs comme un scandale (6). Parmi ses dŽputŽs un certain
Jean-Marie LE PEN qui, ˆ 27 ans, est le plus jeune de l'AssemblŽe É et fera
parler de lui ultŽrieurement.
C'est la consternation dans le petit
monde politicien, la rigolade chez les humoristes, et une certaine crainte chez
les rŽpublicains.
Sur le plan du crŽdit international de
la France, cela fait dŽsordre, mais pas plus que les crises ministŽrielles ˆ
rŽpŽtition depuis l'Žlection de la premire AssemblŽe nationale du 10 novembre
1946 (17 gouvernements en . . . 10 ans), et les treize tours de scrutin pour
Žlire en 1953 RenŽ COTY, prŽsident de la RŽpublique, avec des pouvoirs bien
limitŽs.
Conclusion :
Le Front rŽpublicain avec environ 170
dŽputŽs remporte nŽanmoins un succs, mais ne dispose pas de la majoritŽ
absolue ˆ l'AssemblŽe (299). Guy MOLLET (SecrŽtaire gŽnŽral de la SFIO) est
investi le 2 fŽvrier (7).
Le Front RŽpublicain a axŽ toute sa
campagne Žlectorale sur le thme de la paix en AlgŽrie; il ne peut qu'tre
soutenu par les communistes, ce qui a lieu lors du vote d'investiture.
Le plan de paix repose sur le triptyque
: cessez-le-feu, nŽgociation, Žlections gŽnŽrales.
Il est clair dans l'esprit des Franais
que le gouvernement doit rŽsoudre rapidement le problme algŽrien, mais les
conceptions divergent au sein du Parlement, comme de part et d'autre de la
MŽditerranŽe sur les moyens d'y parvenir (8).
Des contacts secrets entre Žmissaires de
Guy MOLLET et du FLN au Caire, ˆ Belgrade puis ˆ Rome, n'aboutiront pas (9). La capture illŽgale de l'avion qui conduisait les chefs du FLN de Rabat ˆ Tunis
(22/10/1957), puis l'expŽdition franco-anglaise sur le canal de Suez ne
faciliteront pas nos rapports avec le monde arabe, comme avec les USA et
l'URSS. D'un c™tŽ l'intensification des attentats FLN en AlgŽrie contre les
civils europŽens, mais aussi contre des musulmans, de l'autre la duretŽ des
rŽpressions, bloquent toute situation politique.
Notes annexes :
(1) dont un auteur britannique
analyse avec clairvoyance la situation en France, Ronald MATTHEWS: La mort de
la quatrime RŽpublique. Edit. Julliard (1955).
(2) Cf. Alain-GŽrard SLAMA: La
guerre d'AlgŽrie. Edit. DŽcouvertes Gallimard, Histoire n¡301 (1996).
Le bilan des exactions du FLN entre
le 1er novembre 1955 et le 31 dŽcembre
1956 montre la gravitŽ de la situation: les pertes civiles s'Žlvent ˆ 3677
tuŽs et 2790 blessŽs, dont 3030
tuŽs et 1652 blessŽs musulmans, parmi les militaires et forces de l'ordre: 1805
tuŽs et 3785 blessŽs. Chez les rebelles: 12 523 tuŽs, 711 blessŽs capturŽs et
4692 prisonniers. 1000 exploitations agricoles incendiŽes ou pillŽes, 500
machines agricoles dŽtruites, 300 Žcoles saccagŽes, sans compter les rŽcoltes
et arbres fruitiers plus ou moins dŽtruits (in Rapport Žtabli pour le
ministre-rŽsident).
(3) "P. MENDéS FRANCE constitue
le symbole et le dŽnominateur commun de la coalition" in biographie de Jean LACOUTURE: Pierre MENDéS FRANCE.
Edit. Seuil, 1981, p.406. D'o des tracts Žlectoraux du type "avec PMF, votez X. Le Front
rŽpublicain protestera contre le "coup du 2 dŽcembre" (date de la
dissolution de l'AssemblŽe) et en appellera ˆ "la dŽfense de la
RŽpublique". On a du mal ˆ s'imaginer E. FAURE travesti en NapolŽon III.
(4) Formule qui serait due ˆ E.
DEPREUX d'aprs le journaliste du "Monde" R. BARILLON.
(5) Cf. "Les dossiers de l'histoire"
N¡ 52, janv-fev 1985; interview concernant l'ouvrage: Yalta, ou le partage du
monde.
(6) Comme l'exprimera fort honntement dans ses mŽmoires
Michel DEBRƒ: Trois rŽpubliques pour une France. tome 2: 1946-1958. Edit. Albin
Michel (1988). Onze dŽputŽs seront en effet invalidŽs sur les 52 Žlus !
(7) La pratique constitutionnelle
veut que l'on fasse appel, en premier lieu, au chef du plus important parti de
la majoritŽ. Il est plus que probable que la nomination de P. MENDéS FRANCE
n'aurait pas ŽtŽ mieux reu ˆ Alger que ne le fut G. MOLLET le 6 fŽvrier, du
fait de l'exaspŽration nationaliste des europŽens et la dŽfiance des
militaires. Une crise ministŽrielle
n'est pas ˆ exclure d'entrŽe. Les lendemains de cette manifestation
d'Alger ne seront qu'une dŽsintŽgration du Front rŽpublicain (avec les
dŽmissions du gouvernement de MENDéS FRANCE puis de SAVARY), comme du Parti
Socialiste SFIO lors de la crŽation du parti socialiste autonome.
(8) Sur l'origine de la guerre
d'AlgŽrie, notamment les graves Žvnements du 8 mai 1945 puis du 1er novembre
1954, on peut se rŽfŽrer aux deux tomes de Claude PAILLAT: Le Gupier, La
Liquidation. Edit. Robert Laffont (1969 et 1972); P. MIQUEL (op. cit. 1982); A.-G. SLAMA (op. cit. 1996). Alphonse JUIN & Amar
NAROUN: Histoire parallle: La France en AlgŽrie 1830-1962. Edit. Librairie
acadŽmique Perrin (1963); Michel MASSENET: Contrepoison ou La morale en
AlgŽrie. Edit. Grasset (1957).
(9) Divers Žmissaires, sous les gouvernements de G. MOLLET, puis de M. BOURGéS-MAUNOURY, auront des contacts avec des reprŽsentants du FLN malheureusement sans rŽsultats du fait des tendances divergentes entre ceux qui poussaient ˆ l'indŽpendance immŽdiate (soutenus par nombre de nos alliŽs atlantiques) et ceux qui refusaient tout statut reconnaissant une autonomie algŽrienne particulire). Une certaine odeurÉ de pŽtrole (dŽcouverte il y a peu) n'Žtant sans doute pas Žtrangre ˆ l'intervention discrte de certains). Cf. J.-Y. Go‘au-Brissonnire: Mission secrte. Edit. Lieu Commun (1992).
Note complŽmentaire :
Hugh Roberts (1) souligne fort justement que la France est sortie exsangue de la premire guerre mondiale (1914-18), mais contrairement ˆ l'Angleterre, avec des ambitions et prŽtentions impŽrialistes intactes. Sa politique coloniale sera marquŽe par un Žcart entre les fins poursuivies et les moyens disponibles, Žcart qui deviendra dramatique au lendemain de la Seconde Guerre mondiale quand elle tentera de rŽtablir sa puissance impŽriale d'antan dans un contexte mondial qui lui sera hostile aussi bien ˆ l'Est que de la part des USA.
Les Žvnements de novembre1954, totalement sous-estimŽs par les europŽens en AlgŽrie, et plus encore par le peuple franais en mŽtropole, dŽmontrent l'aveuglement ou l'incompŽtence des Žlus sinon la pusillanimitŽ des gouvernants.
Aux dŽputŽs d'origine musulmane en 1945 et 1946 (disposant de 16 Žlus dans un collge dit des non citoyens) s'oppose le bloc des dŽputŽs europŽens (collge dit des citoyens avec 13 siges). Si parmi les premiers certains sont affiliŽs au PCF et ˆ la SFIO, ils rallieront le FLN faute de se faire entendre et ˆ la suite du truquage des Žlections du 4 avril 1948 sur ordre du gouverneur gŽnŽral socialiste Marcel-Edmond NAEGELEN, suivi de celui des lŽgislatives de juin 1951 et lors des municipales d'avril-juin 1953. Contrairement ˆ ce que le ministre de l'intŽrieur F. MITTERRAND voulait faire croire ˆ la mŽtropole, les dŽpartements d'AlgŽrie ne disposaient pas du mme statut que celui de la Seine ou des PyrŽnŽes-Orientales (2). La mŽconnaissance totale des jeunes mŽtropolitains concernant l'AlgŽrie explique l'envoi aisŽ du contingent (mis ˆ part quelques sporadiques mouvements de contestation dues, pour l'essentiel, ˆ l'actif du PCF) et la durŽe des opŽrations militaires durant six annŽes. Personnellement de la "classe 56" je peux en tŽmoigner, habitant au surplus ˆ Paris, prs du Boulevard Barbs-Rochechouart, o je c™toyait des algŽriens dont la discrŽtion Žtait totale. La premire phase de la gŽnŽration 3 (comme dŽfinie page 194) n'aura plus grande confiance dans les hommes politiques (ˆ l'exception du PCF).
RŽfŽrence:
(1) Cf. Hugh ROBERTS: PrŽmisses
historiques d'une libŽration inachevŽe. In Aurs/AlgŽrie 1954. Edit. Autrement- SŽrie MŽmoires
n¡33 (Novembre1994); pp. 72-92.
(2) Il faudra attendre le 22 juillet 1958 pour que le timbre
postal mŽtropolitain affranchisse pour la premire fois le courrier adressŽ
d'AlgŽrie (Cf. Jean-Franois REVEL: Le style du GŽnŽral 1959. Edit. Complexe,
1988, p.203)
16 -
RŽfŽrendum du 28 septembre 1958
La situation, nŽe de l'impossibilitŽ
pour les gouvernements issus de l'AssemblŽe nationale Žlue en janvier 1956 de
parvenir ˆ une pacification et une rŽconciliation des deux communautŽs en
AlgŽrie, a conduit ˆ l'exaspŽration d'une grande majoritŽ des Franais
d'AlgŽrie, soutenus par l'armŽe de mŽtier le 13 mai 1958 (1). Le discrŽdit du
systme et des parlementaires, quelles que fussent les qualitŽs indŽniables de
nombre d'entre eux, ont fait le reste au regard des Franais de la mŽtropole.
Moindre mal pour beaucoup, compte tenu
des circonstances (o le "Franais moyen" avait pu craindre le pire,
et de toute manire n'avait aucune intention de dŽfendre, ni le rŽgime, ni les
dŽputŽs), le gŽnŽral de GAULLE est investi PrŽsident du Conseil par l'AssemblŽe.
La rŽvision de la Constitution de 1946
(prŽvue par l'article 90) est votŽe par 350 voix contre 161.
Dans le gouvernement de GAULLE d'union
nationale (communistes exclus) on trouve des reprŽsentants de tous les partis.
C'est dans cette ambiance qu'a lieu le rŽfŽrendum
sur une nouvelle constitution, exigŽe par de GAULLE pour son retour au pouvoir fin mai (1).
Si peu de Franais ont lu les 92
articles du texte, chacun est bien conscient de la nŽcessitŽ d'un renforcement
de l'exŽcutif, et d'un retour ˆ la conception rŽpublicaine de nos a•eux de
1789, fondŽe sur la sŽparation des pouvoirs lŽgislatif, exŽcutif et judiciaire.
La loi constitutionnelle du 3 juin,
complŽtŽe par l'ordonnance du 20 aožt, propose de rŽpondre ˆ la question unique
: "Approuvez-vous la Constitution qui vous est proposŽe par le
Gouvernement de la RŽpublique".
La campagne est lancŽe par de GAULLE le
4 septembre (date symbolique de la proclamation de la IIIe RŽpublique).
Peu d'hommes politiques se risqueront ˆ
appeler ˆ voter NON. Certains voient dans ce rŽfŽrendum un simple plŽbiscite
pour ou contre de GAULLE (le PCF et quelques personnalitŽs non communistes).
L'appel ˆ voter NON vient du PCF, ce qui est logique puisque la conception
marxiste de l'histoire n'a que faire du pluralisme politique et de la
conception rŽpublicaine de la sŽparation des pouvoirs (comme le dŽmontre
l'application du systme politique dans les pays de l'Est), de Franois
MITTERRAND (2) et de Pierre MENDéS FRANCE, qui entra”nent respectivement une
partie de l'UDSR et une fraction des radicaux. Et ˆ l'autre extrme Pierre
POUJADE, chef de file de l'UDCA.
La SFIO, divisŽe ˆ l'origine, se rallie
dans sa grande majoritŽ ˆ la position de Guy MOLLET (qui participe au
gouvernement avec deux autres ministres). Si Gaston DEFFERRE (tendance
social-dŽmocrate ˆ la SFIO) s'est ralliŽ Žgalement au OUI, comme Paul ALDUY
(qui a participŽ ˆ la rŽdaction de la nouvelle constitution), une minoritŽ fait
scission avec Edouard DEPREUX, Daniel MAYER, Robert VERDIER et Alain SAVARY, ce
dernier pourtant Compagnon de la LibŽration (ils fondent le PSA, Parti
socialiste autonome).
Les "gaullistes" appellent ˆ
voter OUI, comme le MRP (Pierre PFLIMLIN est ministre d'ƒtat) et les
IndŽpendants (Antoine PINAY est ministre des Finances).
La grande presse dans sa totalitŽ (ˆ
l'exception de celle d'obŽdience communiste) fait campagne pour le OUI, tandis
que les "associations civiques" militent contre l'abstention, et mme
les Žvques qui rappellent "l'obligation de conscience" de voter.
La campagne dans le dŽpartement :
Le PCF et la CGT mobilisent leurs
militants pour une propagande active (affiches, tracts, journaux, et rŽunions
publiques). Les arguments portent sur l'absence de prŽcisions quant aux
"droits sociaux", sur l'article 4 qui prescrit aux partis de
respecter les principes "de la dŽmocratie", et voient dans le chef de
l'ƒtat un "prince-prŽsident ˆ la NapolŽon III".
Certains radicaux comme Jean BAYLET,
avec le soutien de "La DŽpche du Midi" (peu diffusŽe dans le
dŽpartement), critiquent l'aspect "prŽsidentialiste" de cette
Constitution qui risque de rŽduire l'AssemblŽe nationale ˆ une simple chambre d'enregistrement
(article 49/3).
Ë l'opposŽ, Paul ALDUY a pris fermement
position pour le OUI (ds juin) et s'est expliquŽ publiquement dans "Le
Monde" des 15-16 aožt. On ne peut en dire autant du second dŽputŽ
socialiste Žlu en 1956, Arthur CONTE, qui ne s'exprimera sur le sujet que . .
le 17 septembre dans "L'IndŽpendant".
Les Radicaux, dont la tendance
"mendŽsiste" avait ŽtŽ majoritaire un certain temps, se compromettent
peu.
Les responsables locaux, du MRP aux
IndŽpendants, en passant par les RŽpublicains sociaux, se prononcent
naturellement pour le OUI.
Seule exception ˆ droite, l'UDCA.
RŽsultats :
Banyuls
DŽpartement
MŽtropole
Inscrits
2389 (+2 /1956) 147.478 26.603.464
Abst : 331 (13,85%) (20,30%)
(15,60%)
Votants: 2058
(86,15%) (79,72%)
(84,40%)
Blancs: 23 ( 1,12%) ( 1,40%)
( 1,34%)
S.Expr.: 2035
(85,18%) (78,60%)
(83,30%)
OUI : 1648
(80,98%) (71,99%)
(79,25%)
NON : 387 (19,02%) (28,01%)
(20,75%)
Remarques :
Par rapport aux Žlections lŽgislatives
de 1956, il n'y a pas afflux de nouveaux inscrits.
Le taux d'abstention est l'un des plus
faible jamais observŽ ˆ Banyuls comme au plan national, et indique bien
l'importance perue de ce scrutin.
Les consignes des partis en faveur du
OUI ont ŽtŽ parfaitement respectŽes, aussi bien ˆ Banyuls que dans le pays, o
les pourcentages de OUI sont presque identiques.
On remarque, et ce n'est ni la premire
ni la dernire fois, que les votes ˆ Banyuls sont plus proches des votes
"nationaux" que dŽpartementaux (dŽsŽquilibrŽs par le "poids
sociologique" de Perpignan).
Le NON ne rŽcolte pas, et de loin, la
somme des voix du PCF et de l'UDCA (total de 1956 : 606 - 387 = 219). Des
Žlecteurs communistes ont fait dŽfection (il convient de rappeler quelques
faits qui se sont produits les annŽes prŽcŽdentes: la publication du rapport
Krouchtchev dŽnonant les crimes de Staline, les Žmeutes de Potsdam en
Allemagne de l'Est, et l'intervention des troupes du pacte de Varsovie en
Hongrie).
DE GAULLE a effectuŽ un voyage en
AlgŽrie du 4 au 7 juin, et dŽclare dans un discours qui aura de graves
consŽquences par la suite qu'il n'y a plus en AlgŽrie que des "Franais ˆ
part entire". Or les AlgŽriens, toutes confessions confondues, voteront ˆ
une Žcrasante majoritŽ pour le OUI (3). Quelles que soient les pressions
exercŽes sur la population musulmane, on peut lŽgitimement se demander en
mŽtropole ˆ ce moment quelle est la reprŽsentativitŽ et l'influence rŽelle du
FLN. Cette donnŽe renforcera le camp des partisans de l'AlgŽrie franaise et
encouragera la poursuite de la rŽpression contre des terroristes
anti-dŽmocrates.
Incontestablement, s'il n'est pas un plŽbiscite
pour de GAULLE, il correspond, au-delˆ du texte constitutionnel lui-mme, au
souhait de nombreux mŽtropolitains, y compris de gauche, de voir l'AlgŽrie
demeurer librement dans la RŽpublique (mais pas en dehors de la volontŽ des
populations musulmanes autochtones exprimŽe par des Žlections libres), et au
profond dŽsir d'une stabilitŽ de l'exŽcutif (4).
Le rŽsultat est ambigu dans le score des
NON, mŽlangeant des votes allant des communistes aux groupuscules fascistes
(que l'on avait pu voir peu avant mai prs de Paris, dŽfiler en bottes noires
et munis de flambeaux) (5).
Notes annexes :
(1) Sur les conditions du retour du
GŽnŽral de GAULLE, et le r™le de certaines personnalitŽs du gouvernement de
Pierre PFLIMLIN prŽcŽdant et suivant les Žvnements du 13 mai, on peut se
rŽfŽrer ˆ l'ouvrage de Pierre
PFLIMLIN: MŽmoires d'un EuropŽen de la IVe ˆ la Ve RŽpublique.
Edit. Fayard (1991).
(1) Cf. Michel DEBRƒ: MŽmoires. 2.
Edit. Albin Michel (1988); A.-G. SLAMA: ( op.cit.,1996).
(2) Qui publiera ultŽrieurement un
rŽquisitoire d'une rare violence: Le coup d'Etat permanent. Edit. Plon (1964),
ultŽrieurement Edit. Julliard (1984) et Edit. Union gŽnŽrale d'Editions, 10/18
(1993). Cela lui vaudra le ralliement des partis de gauche, y compris du parti
communiste, ˆ sa candidature lors des Žlections prŽsidentielles de 1965 contre
de GAULLE.
(3) S. ExprimŽs: 3 280 000, Oui: 3
164 209, Non: 11 579. Un recensement prŽalable de la population donne:
musulmans: 7 956 892, non-musulmans: 974 245. Le nombre des inscrits est de 3 302 600 inscrits dont 200
000 militaires. MalgrŽ les consignes d'abstentions et de menaces du FLN,
l'AlgŽrie a votŽ oui ˆ 96%.
(4) Parmi les nombreux ouvrages
consacrŽs ˆ la IVe
RŽpublique le plus concis est sans doute celui de Pierre MIQUEL (op. cit.1982); Jacques FAUVET: La quatrime
RŽpublique. Edit. Fayard (1959); Georgette ELGEY: Histoire de la IVe RŽpublique 1954-1959. tomes 1 et 2.
Edit. Fayard (1992 & 1997).
(5) Cf. Alain PEYREFITTE: c'Žtait de
Gaulle. Edit. Fayard. (op. cit., 1994).
Remarque gŽnŽrale :
Hugh Roberts (1) souligne fort justement que la France est sortie exsangue de la premire guerre mondiale (1914-18), mais contrairement ˆ l'Angleterre, avec des ambitions et prŽtentions impŽrialistes intactes. Sa politique coloniale sera marquŽe par un Žcart entre les fins poursuivies et les moyens disponibles, Žcart qui deviendra dramatique au lendemain de la Seconde Guerre mondiale quand elle tentera de rŽtablir sa puissance impŽriale d'antan dans un contexte mondial qui lui sera hostile aussi bien ˆ l'Est que de la part des USA.
Les Žvnements de novembre1954, totalement sous-estimŽs par les europŽens en AlgŽrie, et plus encore par le peuple franais en mŽtropole, dŽmontrent l'aveuglement ou l'incompŽtence des Žlus sinon la pusillanimitŽ des gouvernants.
Aux dŽputŽs d'origine musulmane en 1945 et 1946 (disposant de 16 Žlus dans un collge dit des non citoyens) s'oppose le bloc des dŽputŽs europŽens (collge dit des citoyens avec 13 siges). Si parmi les premiers certains sont affiliŽs au PCF et ˆ la SFIO, ils rallieront le FLN faute de se faire entendre et ˆ la suite du truquage des Žlections du 4 avril 1948 sur ordre du gouverneur gŽnŽral socialiste Marcel-Edmond NAEGELEN, suivi de celui des lŽgislatives de juin 1951 et lors des municipales d'avril-juin 1953. Contrairement ˆ ce que le ministre de l'intŽrieur F. MITTERRAND voulait faire croire ˆ la mŽtropole, les dŽpartements d'AlgŽrie ne disposaient pas du mme statut que celui de la Seine ou des PyrŽnŽes-Orientales (2). La mŽconnaissance totale des jeunes mŽtropolitains concernant l'AlgŽrie (3) explique le dŽpart aisŽ du contingent (mis ˆ part quelques sporadiques mouvements de contestation dus, pour l'essentiel, ˆ l'actif du PCF) et la durŽe des opŽrations militaires durant six annŽes. Personnellement de la "classe 56" je peux en tŽmoigner, habitant au surplus ˆ Paris, prs du Boulevard Barbs-Rochechouart, o je c™toyais des algŽriens comme on aurait dit des bretons ou des corses. La premire phase de la gŽnŽration 3 (comme dŽfinie page 194) n'aura plus grande confiance dans les hommes politiques (ˆ l'exception du PCF).
Notes annexes:
(1) Cf. Hugh ROBERTS: PrŽmisses historiques d'une
libŽration inachevŽe. In
Aurs/AlgŽrie 1954. Edit. Autrement- SŽrie MŽmoires n¡33 (Novembre1994); pp.
72-92.
(2) Il faudra attendre le
22 juillet 1958 pour que le timbre postal mŽtropolitain affranchisse pour la
premire fois le courrier adressŽ d'AlgŽrie.
(3) Les attentats terroristes par le FLN (considŽrŽ comme des autonomistes sans lŽgitimitŽ et peu nombreux) constituaient la perception qu'en donnaient les mŽdias, ˆ l'exception de rares journaux peu lus par les jeunes ˆ cette Žpoque plus prŽoccupŽs par leurs Žtudes ou leur travail. Les seuls attentats en mŽtropole correspondaient ˆ des rglements de compte au sein de la communautŽ algŽrienne. Je peux en tŽmoigner puisque rŽsidant dans un h™pital parisien (je renvois au registre des dŽcs de la morgue et de l'Institut MŽdico-lŽgal).
17 -
LŽgislatives des 23 et 30 novembre 1958
Un nouveau mode de scrutin a ŽtŽ
instaurŽ ˆ la place de celui des apparentements, qui avaient fait les beaux (ou
mauvais) jours de la "troisime force" en 1951 et 1956. Le scrutin
sera majoritaire uninominal de circonscription ˆ deux tours.
Deux consŽquences: le dŽcoupage du pays
en circonscriptions (d'o la dŽnonciation
constante d'un "charcutage Žlectoral") et le nombre des
dŽputŽs, qui passe de 544 ˆ 465.
Dans le dŽpartement, cela se traduit par
deux arrondissements en nombre ˆ peu prs Žgal d'habitants: Perpignan-CŽret et
Perpignan-Prades. Mais Perpignan est dŽcoupŽ trs inŽgalement, son
"poids" en Žlecteurs Žtant supŽrieur dans le premier de ces deux
arrondissements.
On peut dire que la logique de ce
dŽcoupage Žchappe ˆ tout "esprit cartŽsien" (mais la science
politique est-elle une scienceÉ autre qu'humaine ?). En consŽquence un des
dŽputŽs sortants restera ... sur
la touche ! On comprend le tollŽ gŽnŽral soulevŽ dans le dŽpartement par ce
coup du sort.
Banyuls se retrouve, comme par le passŽ,
dans la circonscription de Perpignan-CŽret (1 re circonscription).
Cinq candidats se prŽsentent dans notre
circonscription, soit dŽsignŽs par leur parti, soit ˆ titre personnel, ce qui
constitue l'intŽrt de ce mode de scrutin.
1- Pour le PCF : Raoul VIGNETTES
(responsable fŽdŽral) et son supplŽant Joseph POMARéDE.
2- Pour l'Union DŽmocratique et
Socialiste pour une RŽpublique nouvelle : Paul ALDUY (dŽputŽ SFIO sortant) qui
avait votŽ l'investiture ˆ de GAULLE et pris trs t™t une position trs ferme
en faveur du OUI au rŽfŽrendum, et son supplŽant Henri GUITARD (maire SFIO de
CŽret).
3- Pour l'Union rŽpublicaine et sociale
(Centre rŽpublicain), en fait reprŽsentant du Parti Radical : Gaston PAMS
(conseiller gŽnŽral) et son supplŽant
le chirurgien Rapha‘l JOUƒ.
4- Pour l'Union rŽpublicaine pour une
France nouvelle (UNR: Union pour la nouvelle rŽpublique, les gaullistes purs et
durs) : GŽrard GARRIGUE (quasi inconnu bien qu'originaire de Millas) et son supplŽant AimŽ
FA (de Perpignan).
5- Pour la DŽfense des LibertŽs
(Poujadistes de l'UDCA et IndŽpendants et paysans): Jean HONTARRéDE et son
supplŽant Jean LODDE.
La campagne peu passionnŽe oppose les
notables des partis traditionnels, bien connus, aux gaullistes de l'UNR quasi
inconnus.
RŽsultats (1er tour) :
Banyuls 1re Circonscription MŽtropole
Inscrits:
2424 (+37 /1956) 72.889 27.236.491
Abstentions: 589 (24,29%)
(27,77%) (22,90%)
Votants: 1835 (75,71%)
(72,23%) (77,10%)
Blancs: 22 (
1,20%)
( 2,10%) ( 3,11%)
S.Expr.: 1813 (74,79%)
(70,71%) (74,80%)
VIGNETTES : 308 (16,98% S.E) (26,11% S.E)
ALDUY:
448 (24,71%--)
(32,79% --)
PAMS:
860 (47,43%--)
(22,62% --)
GARRIGUE:
182 (10,02%--)
(16,40% --)
HONTARéDE
: 15
( 0,82%-- ) (
2,06% --)
MŽtropole:
PCF: 19,20% S.E; PS (SFIO): 15,70% S.E; Radicaux: 7,30% S.E; UFD : 1,20% ; MRP:
11,10% S.E; ModŽrŽs (CNI & RI): 22,1% S.E; UNR: 18,54% S.E; Extrme Droite:
2,6% S.E.
Remarques :
Les abstentions ont augmentŽ ˆ Banyuls
par rapport ˆ 1956 (+172) et au rŽfŽrendum constitutionnel (+258), ce qui sera
Žgalement vrai pour l'ensemble de la mŽtropole. Mais le fait qu'il y ait
dŽsormais deux tours peut avoir incitŽ des Žlecteurs ˆ voir d'o vient . . . le
vent.
Les bulletins blancs ou nuls, en nombre
toujours trs faibles, sont toutefois plus ŽlevŽs que lors des Žlections
antŽrieures et correspondent ˆ ceux du rŽfŽrendum (proviennent-ils des mmes
Žlecteurs, nouveaux ou dŽsabusŽs par le comportement des partis de gauche, ou
sont-ils le fait du . . . hasard?).
Le PCF est en net recul (- 214/ 1956),
comme dans tout le reste du pays o il perd prs du tiers de son Žlectorat.
Le Parti Socialiste SFIO n'existe plus
rŽellement en tant que tel dans le dŽpartement (1), la tendance UDS de Paul
ALDUY le rŽcupre cependant en grande partie (faute d'un candidat
"lŽgitimiste"), mais une cinquantaine de voix manquent qui ne
semblent pas se reporter sur l'UNR. Au plan national, il maintient ses voix de
1956 malgrŽ la crŽation d'un nouveau parti (UFD puis PSA), constituŽ par les
dissidents qui n'avaient pas approuvŽ la politique menŽe en AlgŽrie et dans
l'affaire de Suez par Guy MOLLET, mais surtout son acceptation du rappel de DE
GAULLE et son ralliement ˆ la nouvelle constitution. L'UFD et l'extrme gauche
reprŽsentent 350 000 voix.
Les Radicaux (au sens large) rŽalisent
le meilleur score ˆ Banyuls (1 voix de moins qu'en 1956), mais cela tient au
fait que le candidat est le maire d'Argels et conseiller gŽnŽral du canton, et
que le maire de Banyuls l'a soutenu trs efficacement. Comme en 1956 il a
bŽnŽficiŽ de voix modŽrŽes.
Au plan national c'est la dŽconfiture,
le Parti Radical perd 1 million de voix par rapport ˆ 1956 (passant de 12,7%
des S.Expr. ˆ 7,3%), l'Žlecteur ayant du mal ˆ suivre des leaders comme Pierre
MENDéS FRANCE et Edgar FAURE.
Les gaullistes (UNR) progressent ˆ
Banyuls (+173 voix), gr‰ce ˆ l'apport des voix de l'Union rŽpublicaine (MRP,
ModŽrŽs) de 1956, plus quelques "Poujadistes" repentis, et dŽpassent
de peu ses voix de. . . 1951 (+40).
Sur le plan national c'est la revanche
de l'ex-RPF, l'UNR avec 3 603 958 voix retrouve presque son score de 1951 (-500
000 voix).
Le MRP, qui n'est reprŽsentŽ ni ˆ
Banyuls ni dans la circonscription, perd 500 000 voix dans le pays.
Les ModŽrŽs et IndŽpendants (RI &
CNI) demeurent stables avec prs de 3 millions de voix.
Les divers droite, comprenant l'UDCA,
font 1 million de voix, soit un net recul par rapport ˆ 1956. Ë Banyuls l'UDCA
rŽgresse (-69 voix), comme aux niveaux dŽpartemental et national et . . .
s'auto-Žlimine (exit POUJADE : le sortant est sorti).
L'extrme droite avec
500 000 voix progresse nettement (+400 000 voix/ 1956).
Ce mode de scrutin met naturellement les
candidats mal placŽs au premier tour dans une situation dŽlicate. Ils n'ont
d'autre choix que de se retirer purement et simplement, ou de se maintenir, ou
de se dŽsister pour l'un des candidats mieux placŽs pour l'emporter au second
tour. Certains veulent voir dans ce type de scrutin un progrs par rapport ˆ
celui des apparentements [. . . ˆ voir ! N. de l'a.]
En ce qui concerne notre
circonscription, l'UNR et l'UDCA se retirent. On assistera ˆ ce qu'il est
convenu d'appeler une "triangulaire".
RŽsultats (2 me tour) :
Banyuls Circonscription
Inscrits:
2425
Abst.: 416 (17,15%) (23,27%)
Votants: 2009
(82,85%) (76,73%)
Blancs: 9 ( 0,45%) ( 2,20%)
S.Expr.:
2000 (82,47%) (75,05%)
VIGNETTES: 331
(16,55% S.E) (27,29%
S.E)
ALDUY: 717 (35,85% --) (45,83%
-- )
PAMS: 952 (47,60% --) (26,87% --)
Remarques :
Comme on pouvait s'y attendre les
abstentions ont diminuŽ. Elles sont Žquivalentes ˆ celles de 1956, ˆ . . . 1
voix prs. Ce qui permet de dire que le mode de scrutin (vote pour un parti ou
pour un homme) intervient moins que l'importance que l'Žlecteur accorde aux
circonstances.
Le PCF amŽliore trs lŽgrement son
score (+23).
Paul ALDUY (UDS + SFIO) gagne des voix
gaullistes et des abstentionnistes (+ 269)
Gaston PAMS gagne 92 voix, donc un peu
des deux.
Les deux Žlus du dŽpartement sont P.
ALDUY et A. CONTE qui avaient votŽ l'investiture de DE GAULLE.
AndrŽ TOURNƒ perd son sige de dŽputŽ
du fait que l'on soit passŽ de 3 ˆ 2 dŽputŽs dans le dŽpartement, et en raison
du dŽcoupage Žlectoral.
Conclusion :
Au plan national, la situation est trs
diffŽrente, les candidats de l'UNR bŽnŽficient indirectement du retrait de
candidats (qui laissent leurs Žlecteurs sans consignes de vote) ou d'un
dŽsistement affichŽ. Souvent l'affrontement met aux prises candidat gaulliste
et candidat communiste, le premier bŽnŽficiant ainsi de voix politiquement
disparates. Certains ont voulu y voir l'opposition entre le camp de
"l'AlgŽrie Franaise" contre celui de "l'abandon".
Il convient de prŽciser que sur les 67
Žlus d'AlgŽrie, tous sont des partisans de "l'intŽgration".
La consŽquence de ce deuxime tour sera
un "raz-de-marŽe" de dŽputŽs UNR (gain de 1 500 000 voix) avec 198
siges, contre 10 au PCF, 44 au Parti Socialiste SFIO, 23 aux Radicaux, 57 au
MRP et 133 au CNI.
L'inŽgalitŽ de ce mode de scrutin, dit
majoritaire, sera encore plus marquŽe que celle inhŽrente aux apparentements de
1951 ou 1956, puisque avec des pourcentages sensiblement Žquivalents au 1er
tour (donc un nombre de voix proche), il y aura en fin de course 1 dŽputŽ
communiste pour 20 UNR !
Autre fait marquant, l'Žlimination de
l'AssemblŽe nationale de quelques grands tŽnors: Edgar FAURE, Gaston DEFFERRE,
Pierre MENDéS FRANCE, Franois MITTERRAND et Jacques DUCLOS. Heureusement le
SŽnat permettra ultŽrieurement quelques . . . rŽembauchages !
131 dŽputŽs sortants seulement sur 537
sont rŽŽlus, renouvelant ainsi considŽrablement le personnel politique (mais au
bŽnŽfice de la droite et des ultras de l'AlgŽrie franaise). Les commentateurs
soulignent que cette assemblŽe est l'une des plus ˆ droite depuis . . . 1871 !
DE GAULLE aurait, semble-t-il, regrettŽ
un tel laminage de la gauche (2).
Jacques CHABAN-DELMAS (UNR) devient
prŽsident de l'AssemblŽe en battant Paul RAYNAUD.
Le 21 dŽcembre, le GŽnŽral de GAULLE est
Žlu PrŽsident de la RŽpublique par le collge des grands Žlecteurs par 78,5%,
contre 13,1% ˆ Georges MARRANE (PCF) et 8,4% ˆ Albert CHATELET (UFD).
Dans le dŽpartement, les 427 grands
Žlecteurs issus des conseils municipaux (Žlus en 1953) et les membres de droit
(parlementaires et conseillers gŽnŽraux) ont Žlu de GAULLE par 333 voix, contre
58 ˆ MARRANE et 31 ˆ CHATELET. Notons que le secrŽtariat fŽdŽral du Parti
Socialiste a appelŽ ˆ voter pour de GAULLE.
Michel DEBRƒ forme le 9 janvier 1959 le
second ministre de la V me RŽpublique. Il est composŽ, outre des gaullistes,
des MRP et des IndŽpendants. Les socialistes se sont retirŽs en dŽsaccord sur
la question scolaire et les mesures sociales qu'ils jugent insuffisantes, mais
ˆ ces motifs de faade s'ajoute naturellement le grave Žchec Žlectoral dž ˆ la
suprŽmatie des communistes ˆ gauche, et de l'UNR sur le centre et la droite
(3).
Notes annexes :
(1) Roger QUILLOT: La S.F.I.O. et
l'exercice du pouvoir 1944-1958. Edit. Fayard (1972).
(2, 3) Cf. Alain PEYREFITTE (op. cit. 1994)