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LŽgislatives des 23 et 30 juin 1968
Causes lointaines :
Tout
au long de l'annŽe 1967 de nombreuses grves limitŽes, mais touchant des
secteurs trs divers tant dans le public que dans le privŽ, ainsi qu'une
agitation Žtudiante localisŽe, n' ont pas apparemment alertŽ les pouvoirs
publics (1). Des formations d'extrme gauche d'inspiration mao•ste s'activent,
principalement auprs des jeunes, avec la crŽation des comitŽs Vit-nam (2).
Causes immŽdiates :
Occupation de la Tour administrative de
l'UniversitŽ de Nanterre par des Žtudiants au dŽbut de l'annŽe 1968. Naissance
du "mouvement du 22 mars" dont l'un des leaders est COHN-BENDIT (les
"enragŽs" de Nanterre).
Des Žtudiants empchent Pierre JUQUIN
(membre du PCF) de faire un exposŽ sur la crise de l'UniversitŽ (26/4)
"La Cause du peuple" de
tendance mao•ste publie son 1er n¡ (1/5).
Fermeture de la facultŽ de Nanterre par
le Doyen GRAPPIN (2/5) ˆ la suite d'incidents.
Meeting de protestation ˆ la Sorbonne
contre la fermeture de Nanterre. Christian FOUCHET fait intervenir la police
(3/5). Fermeture de la Sorbonne.
Affrontements le 6/5 au Quartier Latin ˆ
la suite d'une manifestation d'Žtudiants en solidaritŽ avec les condamnŽs du 3.
DE GAULLE interdit la rŽouverture de la
Sorbonne (9/5).
Rencontre UNEF, CGT, CFDT. Georges SEGUY
refuse de mobiliser la CGT pour soutenir les Žtudiants (9/5).
JournŽe des barricades au Quartier Latin
avec plusieurs milliers d'Žtudiants. Ils ne seront dispersŽs par la police que
durant la nuit (10/5). La premire barricade faite de pavŽs, de voitures et de
grilles d'arbre est dressŽe rue Le Goff ˆ 21h. Il y en aura rapidement une
trentaine qui s'Žlveront en d'autres rues du quartier.
Le Recteur ROCHE Žchoue dans ses
nŽgociations avec COHN-BENDIT et
Jacques SAUVAGEOT (UNEF). Le
PrŽfet de police GRIMAUD donnera l'ordre d'intervention des CRS vers 2h (il Žcrira ultŽrieurement ses souvenirs
sur cette pŽriode qu'il aura gŽrŽe sans doute au mieux).
Tous les syndicats appellent ˆ la grve
gŽnŽrale. On estime ˆ 9-10 millions le nombre des salariŽs qui ont rŽpondu ˆ
cet appel (13/5).
Le 14/5 dŽbut des occupations d'usines.
La premire Žtant Sud-Aviation prs de Nantes o 2000 ouvriers sŽquestrent
leurs cadres. Suivent UNELEC ˆ OrlŽans, lock-out ˆ Beauvais, Renault.
L'agitation gagne le trafic aŽrien, la RATP, la SNCF, les PTT, l'ORTF.
Les syndicats tentent de
"canaliser" ces grves spontanŽes venant de la base sous la poussŽe
des jeunes. Des ComitŽs de coordination apparaissent.
Ë l'agitation parisienne, brouillonne,
s'ajoute l'action plus calme mais dŽterminŽe des salariŽs et travailleurs
indŽpendants en province.
RŽouverture sur ordre de POMPIDOU de la Sorbonne qui est rŽinvestie par
les Žtudiants (13/5). Daniel COHN-BENDIT traite les communistes de
"crapules staliniennes", entra”nant la rupture entre le PCF et les
groupes d'extrme gauche.
Les occupations d'usines se gŽnŽralisent
(15/5).
De Gaulle rentre d'un voyage en Roumanie
(19/5).
Tractations secrtes au square d'Anvers
ˆ Paris entre J. CHIRAC et H. KRASUCKI aboutissant au principe d'une
nŽgociation (22/5).
Le 23/5 l'expulsion de COHN-BENDIT de
France dŽclenche une grande manifestation de protestation de jeunes en sa
faveur ˆ laquelle le PCF refuse de s'associer.
DE GAULLE propose un rŽfŽrendum sur la
participation (24/5). Son discours est un Žchec suivi d'une nouvelle nuit de
violences au Quartier latin.
NŽgociations entre le gouvernement
POMPIDOU et les syndicats aboutissant aux accords de Grenelle (25-27/5) (2).
Les grves se poursuivent comme de vastes dŽfilŽs dans les villes de province.
Meeting organisŽ au stade CharlŽty le
27/5 par l'UNEF avec l'aide du PSU, du SNE.Sup (dont le Sec. Gal. est Alain
GEISMAR), la FEN, la CFDT. Y participent AndrŽ BARJONET (3) dŽmissionnaire de
la CGT), Pierre MENDéS FRANCE et Michel ROCARD (27/5). 50.000 personnes sont
prŽsentes.
Meeting sŽparŽ de la CGT avec 12
rassemblements dans Paris.
Ë Boulogne-Billancourt les ouvriers de
chez Renault refusent le protocole d'accord conclu ˆ Grenelle entre les
syndicats et le patronat sous l'arbitrage de POMPIDOU. Partout la base se
prononce contre toute reprise du travail, exigeant le renvoi de POMPIDOU.
Le
28/5 F. MITTERRAND propose la crŽation d'un gouvernement provisoire associant
toutes les forces de gauche avec P. MENDéS FRANCE comme Premier ministre.
DE GAULLE quitte Paris dans le plus
grand secret le 29/5 (pour se rendre ˆ Baden-Baden o il aura un entretien avec
le gŽnŽral MASSU).
Antoine PINAY et Jean LECANUET
approuvent l'idŽe d'un gouvernement MENDéS FRANCE (29/5).
Le 30/5, de GAULLE rŽappara”t et
prononce un discours radiotŽlŽvisŽ: le rŽfŽrendum est reportŽ, l'AssemblŽe
nationale est dissoute, G. POMPIDOU est maintenu. Il appelle ˆ la formation de ComitŽs de dŽfense de la
RŽpublique (CDR) pour "lutter contre la subversion et la dictature communiste".
Les PrŽfets deviennent
Commissaires de la RŽpublique.
Ë l'appel des organisations gaullistes
des centaines de milliers de personnes se rassemblent sur les Champs-ƒlysŽes
derrire AndrŽ MALRAUX et Michel DEBRƒ.
Le 31/5 aux gauchistes criant "Žlections
trahisons", Georges SƒGUY rŽplique que la CGT n'entend pas gner la
campagne Žlectorale (31/5). Le PCF dŽnonce "l'aventurisme" des Žtudiants qui en appellent
aux ouvriers.
Gr‰ce
ˆ l'essence soudain ˆ nouveau disponible les Franais partent tranquillement
pour le week-end de Pentec™te (1/6).
Le gouvernement et les syndicats
cherchent la conciliation (4) alors qu'ˆ la base les grves et les
manifestations se poursuivent dans le calme, rŽclamant la dŽmission du
gouvernement.
Reprise du travail dans le secteur
public (6/6). A l'usine Renault de Flins comme aux usines Peugeot de
MontbŽliard la grve se poursuit associant des ouvriers et des Žtudiants. Les
10/6 et 12/6 un lycŽen Gilles TAUTIN et deux Žtudiants trouveront la mort ˆ la suite de
l'intervention des CRS.
Le schŽma des gauchistes
(provocation-rŽpression-solidaritŽ), comme celui du gouvernement comptant sur
le "pourrissement" des grves et la lassitude de l'opinion publique
ont fait leurs preuves. Les tŽmoignages prouvent que de simples passants et des
blessŽs ont ŽtŽ, ˆ tort, molestŽs par la police.
L'OdŽon est ŽvacuŽ le 14 / 6 et la
Sorbonne le 16.
Ë la suite de ces ŽvŽnements, DE GAULLE
(initialement partisan d'un rŽfŽrendum Équi a fait un bide), sur l'insistance
de POMPIDOU, dissout l'AssemblŽe nationale Žlue l'annŽe prŽcŽdente .
Dans la 1re circonscription quatre
candidats se prŽsentent.
1 - Pour le PCF : Joseph ALBERT avec Narcisse PLANAS
comme supplŽant.
2 - Pour l'URDS associŽ cette fois au label FGDS
(Socialistes, Radicaux de gauche): Paul ALDUY (dŽputŽ sortant), et son
supplŽant Jacques BORDANEIL (radical de gauche, maire-adjoint de Palau).
3 - Pour l'UDR : Jacques GODFRAIN
et son supplŽant le Dr. Roger SOURIS.
4 - Pour le PSU : Antoinette CLAUX (secrŽtaire
fŽdŽral), et Robert SAVELLI.
Le candidat de l'UDR est totalement
inconnu dans le dŽpartement, il est aussi le plus jeune candidat de France (25
ans). Ses interventions sont dirigŽes contre les communistes responsables des
grves et des troubles, en y associant ALDUY prisonnier du PCF. Il inondera la
circonscription d'un tract montrant ALDUY et TOURNƒ , c™te ˆ c™te, dŽfilant au
milieu des drapeaux rouges et noirs. Mais contrairement ˆ la prŽsentation
tendancieuse de ce tract, la photo diffusŽe montre l'une des nombreuses
manifestations intersyndicales qui se sont dŽroulŽes au cours de cette pŽriode
(5).
ALDUY rend le gouvernement POMPIDOU
responsable de la dŽgradation de l'Žconomie et des pratiques autocratiques et
technocratiques des gaullistes. Il dŽnonce l'absence de tout dialogue entre le
gouvernement et un parlement b‰illonnŽ, l'intoxication du pays par le monopole
sur la radiotŽlŽvision, les surcharges fiscales de la TVA. Enfin l'existence
d'un peu moins de 500 000 ch™meurs.
Le PCF assure qu'il ne revendique pas le
pouvoir pour lui tout seul. Il dŽnonce tout ˆ la fois les violences policires
en mme temps que celles des "groupuscules" gauchistes
irresponsables.
Le PSU souligne le sous-dŽveloppement
dont est victime notre dŽpartement et propose le remplacement des prŽfets et
les CODER par des assemblŽes rŽgionales Žlues. Il dŽnonce la fausse solution du
tourisme qui ne crŽe que des emplois saisonniers ˆ faible qualification.
RŽsultats (1er tour) :
Banyuls
Circonscription MŽtropole
Inscrits: 2727
(+ 35 / 1967) 89.060 28.171.633
Abst.: 645 (23,68%) (23,66%) (19,90%)
Votants: 2082 (76,32%) (76,34%) (80,10%)
Blancs: 58 ( 2,79%) ( 2,45%) ( 1,78%)
S.Expr.: 2024 (74,22%) (74,47%
) (78,70%
)
ALBERT: 606 (29,94% S.E) (25,28%
S.E)
ALDUY: 531 (26,23% --) (30,30%
--)
CLAUX: 91 ( 4,49% --) ( 3,38% --)
GODFRAIN:
796 (39,32% --) (41,03%
--)
MŽtropole:
PCF: 20,03% S.E.; PSU: 3,94% S.E.; FGDS: 16,50% S.E.; Centre PDM : 10,34% S.E.;
R.I: 4,14% S.E.; UDR: 43,65% S.E.; Extrme droite : 0,6% S.E.
Remarques :
Les abstentions sont Žquivalentes ˆ
celles de l'annŽe prŽcŽdente. Les votes blancs ou nuls correspondent ˆ ceux du
1er tour de 1967.
La surprise vient du score de GODFRAIN
qui pulvŽrise celui de son prŽdŽcesseur FA en 1967 (+291 voix qui avaient dž se
porter sur ALDUY l'annŽe prŽcŽdente, au moins pour 200 d'entre elles). Il
arrive en tte du ballottage et
fait les voix de DE GAULLE du 1er
tour des prŽsidentielles de 1965 (mais gagne en rŽalitŽ peu d'Žlecteurs nouveaux:
+95/1965 (FA + RAMONET = 657, soit un gain de 139 voix dont certaines doivent
venir d'abstentionnistes de 1967). Il s'agit plus d'une rŽponse ˆ la
dramatisation du discours de DE GAULLE
le 30 mai, que de l'Žlection de dŽputŽs sur des programmes prŽcis; on
peut aussi y voir les effets des images tŽlŽvisŽes qui privilŽgient le
spectaculaire au dŽtriment du fond.
Le candidat du PCF retrouve exactement
ses voix de l'annŽe prŽcŽdente au 1er tour (ˆ 3 voix prs).
Paul ALDUY perd 128 voix. Et on ne peut
vraisemblablement pas en soustraire les 91 voix du PSU (absent en 1967) qui ont
dž faire partie des abstentions (1er tour de 1967), soit 706 - 91 = 615.
La FGDS et le PCF ayant passŽ des
accords de dŽsistement rŽciproque, J. ALBERT se retire. Alors que dans la 2 me
circonscription l'opŽration est inverse, les candidats de la FGDS (Dr. AndrŽ
ROQUéRE et Claude RAZOULS) appellent ˆ voter pour A. TOURNƒ (PCF), en grande
difficultŽ devant Arthur CONTE (ex-SFIO, devenu . . . pompidolien).
La campagne est virulente comme en
tŽmoignent les articles parus dans "L'IndŽpendant" des 26 et 28 juin.
Le 29/6 veille du second tour DE GAULLE
intervient dans la campagne par une allocution radiotŽlŽvisŽe, alors que
POMPIDOU mne une campagne dŽnonant un complot communiste ! (dont il ne sera
pas apportŽ naturellement la moindre preuve N. de. l'a.)
Un temps sympathisant avec la
contestation Žtudiante, les Franais modŽrŽs ont ŽtŽ lassŽs par la longueur des
grves dans le secteur public, alors qu'ˆ gauche, le "poids des
appareils" (jugeant la situation non rŽvolutionnaire) en a dŽmobilisŽ
beaucoup. La prŽsence de DE GAULLE et le lŽgalisme conformiste des gŽnŽrations
"anciennes", mais aussi la loi Žlectorale, expliquent l'inversion des
rŽsultats par rapport ˆ ceux de l'annŽe prŽcŽdente, dŽmontrant aussi que le
centre est incontournable en temps de crise aigu‘ !
RŽsultats (2 me tour) :
Banyuls Circonscription MŽtropole
Inscrits: 2727
Abst.: 627 (22,99%) (22,53%) (22,17%)
Votants: 2100
(77,01%) (77,47%) (77,83%)
Blancs: 45 ( 2,14%) ( 2,74%)
S.Expr.: 2055
(75,36%) (75,35%)
ALDUY: 1094 (53,23% S.E) (53,38%
S.E)
GODFRAIN: 961
(46,76% --) (46,61%
--)
Remarques :
Les abstentions sont en lŽger recul,
mais peu significatives (-18), les bulletins blancs Žgalement (-13). C'est donc
une apparente stabilitŽ d'un tour sur l'autre (ˆ 31 Žlecteurs prs).
Le candidat de la gauche (pour certains
seulement anti-UDR), progresse de +563 voix, mais comme on pouvait s'y attendre
ne retrouve pas l'intŽgralitŽ des voix communistes, ou aurait-on perdu des
Žlecteurs en cours de route? Logiquement on devrait dŽnombrer entre 1137 (PCF +
FGDS) et 1228 voix (PCF + FGDS + PSU). Il manque entre 43 voix et 134 voix. Il
est plus vraisemblable que ce sont les voix du PSU qui manquent ˆ l'appel au
second tour.
L'UDR progresse de +165 voix. Comme un
transfert est peu imaginable, ces voix doivent provenir d'abstentionnistes du
1er tour. Ce qui permet d'en dŽduire un chassŽ-croisŽ de prs de 6 % des
Žlecteurs inscrits.
Conclusion :
Dans la 1re circonscription Paul ALDUY
retrouve son sige de dŽputŽ, tandis que dans la seconde Arthur CONTE (6) bat
AndrŽ TOURNƒ.
Au plan national, la victoire Žlectorale
de l'UDR se transforme (toujours du fait du scrutin d'arrondissement) en
triomphe parlementaire avec 297 dŽputŽs (+97 siges/ 1967) et 64 RŽpublicains
indŽpendants (GISCARD D'ESTAING) (+7/ 1967). La FGDS a 57 dŽputŽs (-61), le
PCF: 34 (-19), les Centristes : 29 (-13), quant au PSU : +3 -3 = 0.
Comme l'Žcrit un Žditorialiste le
"Parti de la trouille" a gagnŽ (7), et pour d'autres de la
"sagesse".
Le bilan du vaste mouvement (plut™t des
revendications multiformes) amorcŽ en 1967, et qui a explosŽ en mai 1968 (comme
l'on passe des nuŽes ˆ un brusque orage) est maigre, sinon pour les smicards
(mais l'inflation n'est pas loin) . . . et les gŽnŽraux putschistes d'Alger
(amnistiŽs), les premiers comme les seconds seront les seuls ˆ voir leur
situation s'amŽliorer. Le r™le trs modŽrateur du PCF durant toute cette
pŽriode conduit ˆ une crise interne au sein du parti communiste: perte au
profit des formations trotskistes dŽjˆ amorcŽe, critique de la direction.
Une nouvelle gŽnŽration (baby-boom
d'aprs guerre) a fait une entrŽe tonitruante sur la scne politique, aussi peu
respectueuse du "gaullisme" que des notables de la IVe RŽpublique, et s'est autolibŽrŽe de toute contrainte
morale et souvent hypocrite du passŽ (8). En fait, le gros des troupes (ces
"piŽtons de mai") n'Žtait pas en ‰ge de voter, et les plus anciens de
cette gŽnŽration (entre 1935-1945) correspondent ˆ une classe creuse.
Paradoxalement, seul le PCF se posera des questions de fond sur ce mouvement de mai, par ailleurs non strictement Franais. Pour Roger GARAUDY <<le dŽnominateur commun des revendications [correspond] a une exigence de participation ˆ l'initiative historique, aux dŽcisions dont dŽpend leur destin sur les plans Žconomique, politique et de la culture. Refus d'tre intŽgrŽ ˆ un systme sans en discuter le sens, la valeur et les fins>> (9). Sa critique de l'ordre hiŽrarchique (certains diraient cette autocritique) valant aussi bien ˆ l'intŽrieur des Partis que pour l'ƒtat en place, lui vaudra son exclusion progressive du PCF. De GAULLE a parfaitement saisi ces aspirations, mais sans vouloir remettre en cause les structures Žconomiques. Pompidou sera maintenu Premier ministre (c™tŽ conservateur) jusqu'au 10 juillet, date ˆ laquelle il sera remplacŽ par Maurice COUVE de MURVILLE (gaulliste obŽissant), tandis qu'Edgar FAURE sera ministre de l'ƒducation nationale (c™tŽ participation)
Notes annexes :
(1) Rapport d'enqute du Ministre
de la Jeunesse et des Sports (1967): Jeunes d'aujourd'hui. Edit. La
Documentation Franaise, Paris (1967)
(2) Cf. Jean DUMONT, Pierre-AndrŽ
WEBER & Jean SALEZ: Les grandes Žnigmes de mai 1968. tomes 1, 2, 3. Edit.
De CrŽmille, Genve (1970). Cf. HervŽ HAMON & Patrick ROTMAN: GŽnŽration.
Edit. Seuil (tome 1: 1987 & tome 2: 1988). Sur l'analyse de la
composition gŽnŽrationnelle de ces
comitŽs, on se rapportera ˆ l'ouvrage de Jean-Franois SIRINELLI: Les baby-boomers.
Une gŽnŽration 1945-1969. Edit. Fayard (2003).
(3) A. BARJONET dŽmissionne de la
CGT et du PCF; Cf. Le Parti Communiste Franais. Edit. Les Editions John Didier
(1969).
(4) Cf. Georges SƒGUY: "le
mai" de la C.G.T. Edit. Julliard (1972). Cf. Jean FERNIOT: Mort d'une
RŽvolution. Edit. Deno‘l (1968). Le Parti communiste ne souhaitant pas se
trouver entra”nŽ dans un mouvement gauchiste incontr™lable fera donner les
leaders de la CGT pour s'entendre avec G. POMPIDOU, rŽcusant les propositions
de F. MITTERRAND et refusant un gouvernement MENDéS FRANCE. Des consignes
discrtes semblent tre venues de l'URSS afin de sauvegarder DE GAULLE au pouvoir (Cf. AndrŽ Fontaine: La
guerre civile froide. Edit. Fayard (1969). L'auteur replace les Žvnements ˆ la
fois dans le contexte de la situation intŽrieure et explique les raisons de la
position du PCF durant la crise.
(5) Il sera diffusŽ avant le
deuxime tour divers tracts "anonymes" dirigŽ contre Paul ALDUY en
direction des rapatriŽs d'AlgŽrie. Ainsi "le chant des Africains"
sera ŽvoquŽ. "Or qui a voulu toucher ˆ notre Drapeau sinon les communistes
et leurs complices la FGDS. or qui est le candidat FGDS: C'est le camŽlŽon
ALDUY, donc voter ALDUY c'est Trahir notre chant Patriotique, nos Morts".
(documents de l'auteur).
Dans un tract noir ˆ gros point
d'interrogation, on peut lire: "Popaul c'est Popoff contre notre
RŽpublique".
On consultera
"L'IndŽpendant" qui donne, jour aprs jour, l'activitŽ des quelques
comitŽs de coordination qui se sont constituŽs dans les communes du dŽpartement
au cours des ŽvŽnements de mai. Particulirement celui de la C™te vermeille
trs actif qui regroupait l'ensemble des mouvements de grŽvistes du secteur
public, associatifs, mais aussi d'individualitŽs des secteurs agricoles et commerciaux,
et des pcheurs de Port-Vendres.
(6)
Arthur CONTE, nŽ le 31 mars 1920 ˆ Salses, militant socialiste, envoyŽ en
Allemagne en 1943 au titre du STO (o son attitude lui vaudra des camps de
reprŽsailles. SecrŽtaire de la FŽdŽration Socialiste du dŽpartement en 1946,
maire de Salses en 1947, Žlu en 1951 conseiller gŽnŽral du canton de
Latour-de-France jusqu'en 1964. SecrŽtaire d'Etat ˆ l'industrie et au commerce
dans le cabinet de BOURGéS-MAUNOURY (juin-nov. 1957). Il quitte six mois plus
tard la SFIO en dŽsaccord avec la politique d'alliance avec les communistes.
Membre du groupe UDR de l'AssemblŽe nationale, il se prŽtend plus pompidolien
que gaulliste (qu'il avait d'ailleurs combattu en son temps). Il sera l'annŽe
suivante un partisan actif de POMPIDOU lors de son Žlection prŽsidentielle et
l'un des orateurs de la majoritŽ pour le oui au rŽfŽrendum sur l'entrŽe de la
Grande-Bretagne dans l'Europe des Six. Il sera nommŽ prŽsident-directeur
gŽnŽral de l'ORTF en juillet 1972 et dŽmis de sa fonction en octobre 1973 (cf. "Le
Monde" du 24/10/73) par ses propres amis politiques (mais y a-t-il des
amis en politique sinon des opportunitŽs).
(7)
Bilan :
sortants Žlus sortants Žlus
PCF 73 54 Ref
* 1 0
Ex-G 4 1 PDM* 42 29
FGDS 118 57 UDR 200 297
Div G 2 2 RI 44 51
Div.
D 6 5
*:
RŽformateurs (Radicaux indŽpendants); Progrs et DŽmocratie moderne (centristes
ralliŽs ˆ Pompidou).
Cf.
Dominique LEJEUNE: La peur du "rouge" en France. Edit. Belin (2003)
(8)
Ce qui donnera l'occasion ˆ l'auteur sulfureux et bien informŽ qu'est Roger
PEYREFITTE d'Žcrire un nouveau "roman de mÏurs": Des Franais. Edit.
Flammarion (1970). Si on s'est rŽvoltŽ du c™tŽ des Žtudiants dans leur grande
majoritŽ, pour des raisons psychologiques, il n'en a pas ŽtŽ de mme chez les
ouvriers, dont la motivation Žconomique Žtait prŽdominante. D'o, entre autres
considŽrations, les positions du PCF et de la CGT durant cette pŽriode (aux
exceptions prs de certains), et les accords qui furent possibles avec le
gouvernement POMPIDOU.
(9)
Cf. Roger GARAUDY: Le grand tournant du socialisme. Edit. Gallimard (1969).
Note complŽmentaire :
Concernant le dŽpart soudain, et sans prŽvenir son gouvernement, du gŽnŽral de GAULLE ˆ Baden-Baden (o Žtait cantonnŽ les troupes franaises en Allemagne fŽdŽrale) pour y rencontrer le gŽnŽral MASSU. Le gŽnŽral MATHON (1), qui assista aux entretiens, souligne ce fait, non ŽvoquŽ par les gaullistes, de mme que par des auteurs comme AndrŽ FONTAINE (2), que de GAULLE a rŽellement commencŽ des dŽmarches en vue de demander l'asile politique ˆ la RFA. Convaincu ou non par les arguments de MASSU (en Žchange vraisemblablement d'une amnistie des militaires rebelles de l'OAS), il a rapidement surmontŽ son dŽcouragement. "RegonflŽ ˆ bloc" et de retour le 30 mai il prononce une allocution radiodiffusŽe prononcŽe du Palais de l'ƒlysŽe, modle de tactique politique, qui retournera la situation ˆ son avantage (et ˆ celle de son gouvernement) et placera ses adversaires politiques dans une situation inconfortable, sinon ridicule par la grandiloquence d'un MITTERRAND qui n'hŽsitera pas ˆ dŽnoncer la "voix du 18 Brumaire, du 2 DŽcembre et du 13 Mai (1958 s'entend). La dissolution de l'AssemblŽe nationale, prŽconisŽe semble-t-il par POMPIDOU, balaie l'anti-dŽmocratisme proclamŽ par les opposants, comme l'appel ˆ la guerre civile dŽnoncŽe par l'UNEF. A qui voulait-on faire croire en un de GAULLE dictateur!, mme si son autoritarisme, voir son sectarisme sont parfois dŽnoncŽs (hors du "gaullisme" point de salut).
Il n'en demeure pas moins que, coupŽ d'un certain nombre de rŽalitŽs, notamment vis-ˆ-vis de la jeunesse et de l'Žvolution des mÏurs, ces Žvnements lui auront portŽ un coup fatal et, a contrario, renforcŽ POMPIDOU, dont beaucoup des participants contestataires en Mai 1968 souhaitaient au minimum la dŽmission, et un gouvernement plus proche de leurs prŽoccupations (il est vrai multiformes).
Remarque
: Les communistes estiment que chacun de leurs Žlus valent prs de cinq dŽputŽs
gaullistes du fait du mode de scrutin, il n'en demeure pas moins qu'il a perdu
600 000 voix.
Dans
certains cas les Žlecteurs ont manifestŽ leur hostilitŽ ˆ l'alliance
PCF-FŽdŽration. Comme le fait remarquer Raymond BARILLON, 14 candidats
communistes bŽnŽficiant du dŽsistement de ceux de la FGDS et 10 fŽdŽrŽs
bŽnŽficiant du dŽsistement communiste sont ŽliminŽs dans des circonscriptions
o la gauche avait totalisŽ la majoritŽ absolue. Enfin , le fait que 8
candidats seulement de la FGDS
enlvent leurs siges sans l'appoint de l'Žlectorat communiste, contre
42 l'annŽe prŽcŽdente, souligne le recul des mitterrandistes considŽrŽs comme
trop dŽpendant du PCF.
Pour le PCF, le responsable de l'Žchec de la gauche
est le gauchisme. Waldeck ROCHET, dans un rapport prŽsentŽ le 8 juillet au
comitŽ central, estime que "les travailleurs sont entrŽs en lutte pour de
meilleures conditions de vie et non pour imposer un pouvoir politique par la
force insurrectionnelle" et considre des hommes comme SAUVAGEOT, ROCARD
et BARJONET qui estimaient la prise du pouvoir en mai, comme des irresponsables
sinon des provocateurs. A partir de lˆ, le rŽgime a tout lieu d'tre satisfait.
Loin d'avoir refait l'unitŽ de la gauche, la dŽfaite a accentuŽ sa division. Le
pouvoir pourra ainsi coffrer en juin,
sous le chef de reconstitution de ligue dissoute, les dirigeants de la Jeunesse
communiste rŽvolutionnaire (organisation trotskyste) ainsi que d'autres
groupuscules.
Les
tensions entre le PCF et les groupes trotskystes ne feront que s'intensifier
par la suite, notamment le 1er mai 1971, o les cortges auront lieu
sŽparŽment, et o les tombes de Marcel CACHIN et de Maurice THOREZ seront
profanŽes (mais par qui exactement?).
Ë la surprise gŽnŽrale, le 10 juillet 1968, de GAULLE
remplace POMPIDOU, qui est considŽrŽ comme ayant dŽnouŽ la crise (accords de
Grenelle) et comme vŽritable vainqueur des Žlections, par M. COUVE DE
MURVILLE dont le personnage ne
porte pas ˆ l'enthousiame, mais dont le dŽvouement est absolu et ne semble pas
avoir d'ambitions personnelles. Parmi les explications avancŽes pour ce
changement de Premier ministre, on allgue l'opposition de POMPIDOU ˆ la notion
de participation, cheval de bataille du PrŽsident, et que semble confirmer la
prŽsence de RenŽ CAPITANT (gaulliste de gauche, partisan de l'association
capital-travail) dans le nouveau gouvernement, mais dont ni le patronat ni les
syndicats ne veulent.
Note annexe:
(1)
Un
article destinŽ au journal " Le Figaro" par le gŽnŽral MATHON ne sera
jamais publiŽ du fait de son dŽcs, mais n'en existe pas moins pour autant
(comm. pers. ˆ l'auteur). Cette information, qui n'a qu'un intŽrt historique,
n'est donnŽe ici que dans la mesure o certains avaient cru leur heure sonner
(pour MITTERRAND en particulier) . Elle semble bien correspondre ˆ la phrase de
De GAULLE envisageant dans son discours du 30 mai <<toutes les
ŽventualitŽs sans exception>>.
(2)
A. FONTAINE (op. cit., 1969, p.134-135)
29 - RŽfŽrendum du 27 avril 1969
La situation s'est quelque peu apaisŽe
avec la loi d'orientation de l'enseignement supŽrieur d'Edgar FAURE (nouveau
ministre de l'ƒducation nationale) (1), mais la situation du franc subit les
rŽpercussions des hausses de salaire suite aux nŽgociations de Matignon.
A gauche le PCF prend ses distances ˆ
l'Žgard de la politique soviŽtique (invasion de la TchŽcoslovaquie par les
troupes soviŽtiques qui mettent brutalement fin au "printemps de
Prague", menŽ pourtant par le secrŽtaire gŽnŽral du parti communiste A.
DUBCEK), et sur le plan intŽrieur o il se dŽclare pour une "dŽmocratie
avancŽe".
Le Parti Socialiste SFIO demande le
remplacement de la FGDS par un parti rŽsolument socialiste, et Franois
MITTERRAND quitte ses fonctions de PrŽsident de ce rassemblement.
Alain POHER (centre droit) a ŽtŽ Žlu
prŽsident du SŽnat en remplacement de Gaston MONNERVILLE (Radical).
Au cours d'un voyage en Italie, puis en
Suisse, POMPIDOU se dŽclare prt ˆ assumer un destin national, ce qui jettera
un froid dans les milieux gaullistes, mais ne surprendra personne, sinon
l'opportunitŽ du moment choisi.
Le 2 fŽvrier 1969, de GAULLE annonce un
rŽfŽrendum en vue d'une rŽforme du SŽnat (2) et sur une rŽgionalisation.
Celle-ci a pour but de dŽvelopper efficacement la dŽcentralisation, et de tenir
un plus grand compte des revendications Žconomiques en intŽgrant mieux les
syndicats aux dŽbats (fusion du Conseil Žconomique et social et du SŽnat).
Toujours son idŽe de participation qui n'enthousiasme pas G. POMPIDOU.
La procŽdure choisie irrite le monde des
politiciens, et en premier lieu les sŽnateurs qui s'y opposent fortement. Pour
d'autres c'est l'occasion d'une revanche des Žlections de 1968.
Au-delˆ d'un texte technique complexe
dans la rŽdaction, mais non quant au fond, de GAULLE souhaite voir confirmer sa
lŽgitimitŽ de chef de l'exŽcutif, et engage son mandat dans la bataille.
On ne sait plus si l'on vote pour ou
contre un texte, ou pour ou contre de GAULLE.
Tous les avis sur l'issue du scrutin
concordent, mme ceux des plus fidles partisans du GŽnŽral (3).
Si les gaullistes se doivent de faire campagne pour le GŽnŽral, tous
les hommes politiques, y compris le leader des RŽpublicains indŽpendants ValŽry
GISCARD D'ESTAING, appellent ˆ voter NON.
Les Žlecteurs oseront-ils ? Le "moi
ou le chaos" n'effraie personne puisqu'un certain. . . POMPIDOU, le
vŽritable vainqueur des Žlections de 1968, est en rŽserve de la RŽpublique. Et
en parodiant une chanson ˆ la mode en 1989 : " la victime est si belle et le crime est si gai
". Et dans ce cas sans risque.
RŽsultats :
Banyuls DŽpartement MŽtropole
Inscrits: 2799 (+ 72 / 1968) 169.386 28.655.692
Abst.: 666 (23,78%) (22,73%) (19,42%)
Votants: 2133 (76,72%) (77,27%) (80,58%)
Blancs: 48 ( 2,25%) ( 2,47%) ( 2,75%)
S.Expr.: 2085 (74,49%) (75,36%) (77,94%)
OUI: 679 (32,57% S.E) (38,66%
S.E) (46,82%
S.E)
NON:
1406 (67,43% - -) (61,33%
- -) (53,17%
- -)
Remarques
:
Les abstentions sont plus ŽlevŽes ˆ
Banyuls qu'en mŽtropole et identiques ˆ celles du 1er tour de 1968, comme les
bulletins blancs.
Le NON l'emporte largement, dŽpassant le
pourcentage national (+14,23%). Les voix de gauche ayant fait au total 1228
voix, c'est 178 voix qui viennent d'ailleurs, et trs vraisemblablement des
ModŽrŽs qui avaient votŽ pour l'UDR (GODFRAIN) au second tour des lŽgislatives
de 1968 (961 - 796 = 165 ) lors du duel gauche-droite.
Le OUI, rŽduit aux seuls Žlecteurs
vŽritablement en faveur du GŽnŽral, rŽcolte moins de voix que le candidat
gaulliste de 1968 ! (-117), mais la peur est dŽjˆ du passŽ.
Au plan national c'est 1 432 680
suffrages exprimŽs qui sŽparent les NON des OUI. Le coup de poker a ŽchouŽ au
grand regret de ceux qui Žtaient pour le texte, mais ont votŽ NON par
discipline de parti.
Au fait la question Žtait (j'ai failli
l'oublier) : "Approuvez-vous le projet de loi soumis au peuple franais
par le PrŽsident de la RŽpublique et relatif ˆ la crŽation des rŽgions et la
rŽnovation du SŽnat".
Comment croyez-vous qu'un rŽpublicain
jacobin comme Michel DEBRƒ ait votŽ ? (voir ses mŽmoires).
Le 29 avril, ˆ 00h11, une dŽpche du
PrŽsident annonce brivement "Je cesse d'exercer mes fonctions de
PrŽsident de la RŽpublique. Cette dŽcision prend effet aujourd'hui ˆ
midi". signŽ C. de GAULLE
(4).
ConformŽment ˆ la constitution, le
prŽsident du SŽnat, Alain POHER, devient prŽsident de la RŽpublique par
intŽrim. De nouvelles Žlections prŽsidentielles auront lieu en juin.
Notes annexes :
(1) Cf. Edgar FAURE: MŽmoires I
& II. Edit. Plon (1982, 1984).
(2) La rŽforme du SŽnat et sa fusion
avec le Conseil Žconomique et social Žtait dans les projets de DE GAULLE depuis
quelques annŽes, comme le rŽvle Alain PEYREFITTE dans ses mŽmoires (op.
cit. , 1994).
(3) Cf. Christian FOUCHET: Les
lauriers sont coupŽs. Edit. Plon (1973).
(4) Il partira en voyage en Irlande
(un monument en porte tŽmoignage dans un petit village (5), et n'interviendra
pas lors des Žlections prŽsidentielles. RetirŽ ˆ Colombey-les-deux-ƒglises il y
dŽcdera brusquement le 9 novembre 1970. Cf. AndrŽ MALRAUX: Les chnes qu'on
abat É . Edit. Gallimard (1971).
(5) Sneem (comtŽ du Kerry). GravŽ
sur la pierre est inscrit << En ce moment grave de ma longue vie, j'ai
trouvŽ ici ce que je cherchais: tre en face de moi-mme. L'Irlande me l'a
offert de la faon la plus dŽlicate, la plus amicale>>.
30 - PrŽsidentielles des 1er et
15 juin 1969
Le dŽpart volontaire du gŽnŽral de GAULLE, ˆ la suite
de l'Žchec du rŽfŽrendum sur la rŽforme rŽgionale et du SŽnat, impose une
nouvelle Žlection prŽsidentielle, la seconde avec ce mode de scrutin sous la Ve RŽpublique.
Nul n'ignore depuis longtemps que Georges
POMPIDOU sera candidat (dŽclaration de Rome le 17 janvier 1969) (1). Certains
gaullistes lui feront reproche de cette "candidature anticipŽe " qui
supprimera lors du rŽfŽrendum l'argument du "Moi ou le chaos", cher
au GŽnŽral.
ValŽry GISCARD D'ESTAING et son fidle
lieutenant Michel PONIASTOWSKI se sont fait aussi quelques ennemis parmi les
gaullistes purs et durs en cette occasion.
Quoi qu'il en soit, et suite ˆ
l'activitŽ de POMPIDOU en faveur du rŽfŽrendum, celui-ci est soutenu par l'UDR
et les RŽpublicains IndŽpendants. C'est donc avec un candidat unique que les
dŽfenseurs de la Ve RŽpublique iront
ˆ la bataille, et forts de leur infrastructure parlementaire et de leurs
rŽseaux gaullistes.
A gauche, le Parti Socialiste SFIO est
en pleine restructuration, la FGDS n'existe pratiquement plus. Lors de son
congrs ˆ Alfortville, Gaston DEFFERRE "profite" de la fin de la
soirŽe (les dŽlŽguŽs de province Žtant pour nombre d'entre eux partis) pour se
faire "introniser" candidat ˆ la stupŽfaction de nombreux dŽlŽguŽs
qui protesteront (non contre l'homme, mais sur le principe).
Faute de concertation le PCF prŽsentera
son vieux leader Jacques DUCLOS, et le PSU: Michel ROCARD.
La Ligue Communiste RŽvolutionnaire
prŽsente l'une des figures de Mai 1968 : Alain KRIVINE.
Une seule candidature sans grand sens
politique: Louis DUCATEL (ancien conseiller municipal de Paris).
Devant la dŽsunion de la gauche et les
pratiques de certains gaullistes, un candidat inattendu se manifeste: le
PrŽsident du SŽnat (maire de la petite commune d'Ablon prs de Paris,
dŽmocrate-chrŽtien, trs europŽen) et PrŽsident de la RŽpublique par intŽrim
(2).
Alain POHER annonce sa candidature ˆ la
veille de la cl™ture des inscriptions. Il a pour lui plusieurs handicaps : le
peu de temps pour une campagne, le fait qu'il soit peu connu des Franais, et
surtout, comme il me le sera confirmŽ ultŽrieurement, son souci d'ŽquitŽ entre
les candidats. C'est un centriste europŽen et modŽrŽ, sans ambition
particulire autre que celle de la prŽsidence du SŽnat. Il dispose de peu de
soutiens sinon d'une partie des Centristes, et de J-J. SERVAN SCHREIBER qui
dŽnoncera "l'Etat UDR" et le pouvoir faussement dŽbonnaire de
Pompidou.
La campagne ne passionne gure les
foules. POMPIDOU comme POHER ne cherchant aucune dramatisation (tout le monde a
encore en mŽmoire les ŽvŽnements de 1968 et leur ... conclusion).
Si le premier est dŽjˆ bien connu et ne
doute pas de l'emporter, le second se rŽvlera plus ferme qu'on ne le
supposait.
DEFFERRE tentera de crŽer un "choc
psychologique" en associant Pierre MENDéS FRANCE ˆ sa campagne (3). Mais une certaine nonchalance et
son Žlocution "marseillaise" le desserviront.
La rŽvŽlation viendra de Jacques DUCLOS
qui, ˆ 73 ans, fera une campagne tŽlŽvisŽe trs percutante et dŽploiera ˆ
travers le pays une activitŽ toute juvŽnile.
Beaucoup envisagent une dŽfaite de
POMPIDOU . . . revanche de 1968,
jusqu'au jour o J. DUCLOS, traduisant une dŽcision de PCF, affirmera que
POMPIDOU ou POHER c'est " bonnet blanc et blanc bonnet".
RŽsultats (1er tour) :
Banyuls DŽpartement MŽtropole
Inscrits: 2799
(+ 167 / 1965) 169.909 28.779.041
Abst.: 786 (28,09%) (26,53%) (21,80%)
Votants: 2013
(71,91%) (73,47%) (78,20%)
Blancs: 17 ( 0,85%) ( 1,32%) ( 1,28%)
S.Expr.: 1996
(71,31%) (72,49%) (77,10%)
POMPIDOU: 631
(31,6% S.E) (38,5%
S.E) (44
% S.E )
POHER: 582 (29,15% - -) (23,50%
- -) (23,40%
--)
DEFFERRE: 133 ( 6,66% - -) ( 4,36% - -) ( 5,10% --)
DUCLOS: 492 (24,65% - -) (28,31%
- -) ( 21,5% --)
ROCARD: 87 (
4,35% - -) ( 3,03% - -) ( 3,70% --)
KRIVINE: 30 (
1,50% - -) ( 1,11% - -) ( 1,10% --)
DUCATEL: 41 ( 2,05% - -) ( 1,14% - -) ( 1,20% --)
Remarques :
Les
abstentions sont ŽlevŽes si l'on se reporte ˆ celles de 1965 (+348 ou +11,50%)
et traduisent bien que l'enjeu ne para”t pas dŽterminant, ensuite que les
candidats sont aussi moins attractifs.
J. DUCLOS fait moins de voix que le candidat du PCF au 1er
tour des lŽgislatives de 1967 (-111 ) et que . . . AndrŽ SOLEING aux
municipales de 1965 (-91).
G. POMPIDOU arrive en tte, mais naturellement moins que ne
l'avait fait DE GAULLE en 1965 (- 150), et moins bien qu'au rŽfŽrendum
malheureux de 1969 (-48).
Gaston DEFFERRE s'effondre, aussi bien ˆ
Banyuls qu'aux niveaux dŽpartemental et national. C'est triste pour lui, mais
logique puisque sa candidature n'a pas ŽtŽ acceptŽe par de trs nombreux
militants du PS (ni dans le fond, et encore moins dans la forme). La section
locale du PS ayant recommandŽ de ne pas voter pour le candidat de son propre
parti! Son score ˆ Banyuls est
sans grande signification, il est probable que cela est vrai ailleurs.
Alain POHER bŽnŽficie naturellement de
cette situation pour faire un score honnte, plus fort en pourcentage ˆ Banyuls
qu'au plan national (+5,50%), ce qui montre, ˆ la surprise gŽnŽrale, que
POMPIDOU pourrait tre arithmŽtiquement battu.
Le score de Michel ROCARD confirme
l'existence ˆ Banyuls d'un noyau dur de PSU non dŽclarŽ.
Pour le second tour restent donc G.
POMPIDOU et A. POHER. Mais comme tout le laissait prŽvoir, le PCF appelle ˆ
l'abstention, refusant le choix entre un "centriste" et un
"gaulliste" (on ne choisit pas entre "la peste et le
cholŽra"). Le PSU fait de mme, tandis que KRIVINE recommande le vote nul.
A l'inverse, les Partis socialiste et
radical soutiennent POHER, DEFFERRE se dŽsistant pour lui. Entre deux maux ne
faut-il pas choisir le moindre ?
Seul DUCATEL se dŽsiste en faveur de
POMPIDOU, mais ne reprŽsente que 1% au plus.
RŽsultats (2 me tour) :
Banyuls DŽpartement MŽtropole
Inscrits:
2799
Abst.: 835 (29,84%) (32,38%) (30,90%)
Votants: 1964 (70,16%) (
67,62%) (69,10%)
Blancs: 99 ( 5,04%) ( 8,03%) ( 6,52%)
S.Expr.: 1865 (66,63%) (
62,18%) (
64,60%)
POHER: 1128 (60,40% S.E) (47,44%
S.E) (42,40
% S.E)
POMPIDOU: 737 (39,51% -
-) (52,55%
- -) (57,60
% - -)
Remarques :
Les abstentions sont encore plus ŽlevŽes
que lors du premier tour (+49), comme d'ailleurs les votes volontairement nuls
(3,53% des inscrits et 5,04% des votants).
Alain POHER progresse considŽrablement
(+546) et rŽalise un pourcentage anormalement ŽlevŽ ˆ Banyuls de +12,96% et
+18% par comparaison ˆ ceux du dŽpartement et de la mŽtropole. Lors du dŽpouillement du scrutin, Marie-Ange PY (gaulliste de
toujours) avait un visage consternŽ en me demandant s'il en serait de mme
ailleurs qu'ˆ Banyuls. Je la laissai ˆ son "angoisse", sachant qu'un
accord tacite Žtait intervenu entre les socialistes locaux et la cellule du
PCF, via AndrŽ SOLEING, pour ne pas forcer sur le thme de l'abstention . . .
petite consolation locale ˆ une Žlection dŽjˆ acquise d'avance sur le plan
national.
POMPIDOU ne pouvait que faiblement
progresser d'un tour sur l'autre, sauf en mobilisant les abstentionnistes du
premier tour, ce qu'il fit, soit +106 voix.
Un examen attentif du registre Žlectoral
rŽvle un chassŽ-croisŽ des Žlecteurs (dŽjˆ signalŽ antŽrieurement). A savoir,
que 214 inscrits, abstentionnistes au 1er tour, sont venus voter au second,
alors que 263 inscrits, venus au 1er tour, ne sont pas revenus au second. Soit
un chassŽ-croisŽ reprŽsentant 8,54% des inscrits.
Si POMPIDOU n'obtient que 39,51% des
S.E. ˆ Banyuls, sur les plans dŽpartemental et national il l'emporte largement
avec 2.817.495 voix de plus, soit +15,20%.
Notes annexes :
(1) Cf. Georges POMPIDOU: Pour rŽtablir
la vŽritŽ. Edit. Flammarion (1982). Ouvrage qui rŽpond ˆ ceux qui ont vu un
complot pour abattre DE GAULE (cf. Louis Vallon: L'anti De Gaulle. Edit.
Seuil,1969). Il sera exclu de l'UDR et appellera ˆ voter pour MITTERRAND en
1974.
(2) Alain POHER prenant ses
fonctions ˆ l'ElysŽe n'y trouvera aucun papier ni crayon (tŽmoignage ˆ
l'auteur). Voir aussi le Rapport de la commission d'enqute sur les activitŽs
du Service d'action civique: J.O. du 18 juin 1982. 2 tomes parus en 1982 (Edit.
Alain Moreau). Cf. Jacques FAIZANT: Les caprices de Marianne. Edit. Deno‘l
(1969).
(3) Cf. Jean LACOUTURE: Pierre
MENDéS FRANCE. Edit. Seuil (1981). Ouvrage publiŽ un an avant le dŽcs de
P.M.F. (18/10/1982).
Note
complŽmentaire :
Le 21 juin, POMPIDOU nomme Jacques CHABAN-DELMAS
Premier ministre. Devant l'AssemblŽe nationale il prŽsente le 16 septembre son
projet de "Nouvelle SociŽtŽ" sous l'inspiration de son conseiller aux
affaires sociales Jacques DELORS (issu du syndicat CFDT) (1), mais sans
concertation avec son PrŽsident. Ce thme trs politique que constitue la
participation constituera l'une des causes de dissensions entre les deux
hommes. Le Premier ministre aprs avoir obtenu la confiance le 17 mai 1972 (par
368 voix contre 96 et 6 abstentions), dŽmissionnera le 5 juillet en raison de
l'hostilitŽ des RŽpublicains
indŽpendants (Michel PONIATOWSKI) entre autres.
Pierre
MESSMER est dŽsignŽ comme Premier ministre et forme de 6 juillet son
gouvernement, peu diffŽrent du prŽcŽdent, sinon l'entrŽe de gaullistes historiques,
mais toujours avec la prŽsence aux Finances de V. GISCARD D'ESTAING.
En
ce qui concerne notre dŽpartement, Arthur CONTE, soutien de POMPIDOU depuis les
Žvnements de mai 1968, est nommŽ PDG de l'ORTF.
Note annexe:
(1) Cf. J. DELORS : Mes quatre vŽritŽs, In "Le Nouvel Observateur" N¡2044 du 8-14/1/2004.