24 - Municipales du 14 mars 1965
Le Docteur PARCƒ est ˆ la tte de la
municipalitŽ depuis 12 ans et demeure toujours trs populaire. Il est aussi
PrŽsident du Groupement Interproducteurs du Cru Banyuls (GICB), artisan de la
promotion du vin de Banyuls.
Comme en 1959, il forme une "Liste
d'Union dŽmocratique et rŽpublicaine pour la promotion Žconomique de
Banyuls-sur-Mer", qui comprend une majoritŽ de conseillers sortants
(14 sur 23).
Parmi
les nouveaux, un retraitŽ Raymond BATALLER (sans Žtiquette, centro-gaulliste?),
Jean FERRER (sans Žtiquette). Au total 10 socialistes, 10 radicaux, 2
centristes et 1 sans Žtiquette. La liste se prŽsente comme apolitique.
Une
seconde liste s'oppose au maire sortant : " Liste d'Union rŽpublicaine et
de dŽfense des intŽrts communaux", prŽsentŽe par les partis communiste et
socialiste SFIO. Dans cette liste on compte 18 communistes ou sympathisants, et
5 socialistes.
RŽsultats :
Inscrits:
2560 (+ 121 depuis les municipales de 1959)
Abst.: 550 (21,48%)
Votants:
2010 (78,52%)
Blancs: 55 (
2,74%)
S.Expr.:
1965 (76,76%)
MajoritŽ absolue : 983
La liste du Dr A. PARCƒ obtient une
moyenne de 1388 voix, avec comme Žcarts extrmes 1509 et 1175. Pierre FIGUéRES
arrive en tte avec 1509 voix devant Michel GINESTE (pour 1 voix), suivis par
Michel GRAU (1495) et Franois SURƒDA (1473).
Le Dr PARCƒ
n'arrive qu'en 12 me position (87 voix perdues en 6 ans). Sa liste est
triomphalement Žlue, et le troisime mandat du maire sortant s'annonce sous les
meilleurs auspices. L'absence de troisime liste a grandement facilitŽ le
rŽsultat obtenu.
La seconde liste obtient une moyenne de
485 voix, avec des Žcarts de 902 ˆ 331. Le leader de la liste AndrŽ SERRA,
militant communiste, fait 437 voix, AndrŽ SOLEING, retraitŽ de la RATP, vieux
militant du PC, obtient 583 voix (meilleur score des candidats du PCF). On peut
Žvaluer les voix du PC ˆ 450 voix (scores de Laurent MERIGNAC et de Vincent
FORT).
Laurent CENTéNE, retraitŽ des P &
T., militant syndical et de la SFIO, obtient le meilleur rŽsultat de la liste
(902 voix), suivi par Pierre ARNAUD (708), Louis BAILLS ( 698), et Roger NOU (
623), tous SFIO.
Ë
la mairie de Banyuls, la recherche des cahiers des dŽlibŽrations du Conseil
municipal tient de la spŽlŽologie, ou de la visite chez un brocanteur peu
soigneux, et sans aucune sŽcuritŽ de la salle dite "des archives".
N'ayant pu dŽnicher le registre correspondant ˆ mars 1965, je ne peux que faire
appel ˆ monsieur Jean MESTRES (alors conseiller municipal sur la liste d'AndrŽ
PARCƒ) pour me prŽciser que Michel GINESTE (Directeur d'Žcole) est Žlu comme 1
er adjoint, Roger DAVID (retraitŽ des PTT) Žlu 2 me adjoint et Abel PAGéS
(Viticulteur) comme 3 me adjoint en charge du Puig del Mas et des Žcarts.
Les socialistes se trouvent sur les deux
listes et l'activitŽ de la section est devenue pratiquement inexistante.
Il est Žvident que le Parti Socialiste ˆ
Banyuls est ˆ l'image du dŽpartement. La fraction SFIO y est trs affaiblie du
fait de l'attitude des Žlus socialistes, et de leurs alliances et partage des
responsabilitŽs au sein de l'assemblŽe dŽpartementale avec les radicaux et
modŽrŽs.
25 -
PrŽsidentielles des 5 et 19 dŽcembre 1965
Le rŽfŽrendum du 28 octobre 1962
prŽvoyait que la future Žlection du prŽsident de la RŽpublique aurait lieu au
suffrage universel.
Le texte stipule que seuls les deux
candidats arrivŽs en tte au premier tour peuvent se maintenir au second. Pour
tre candidat, il faut recueillir 100 signatures de maires, dŽputŽs ou
sŽnateurs, conseillers gŽnŽraux, rŽparties dans dix dŽpartements au moins.
La campagne est lancŽe trs t™t par
"L'Express" (1) qui annonce un Monsieur "X", en qui l'on
reconna”tra vite Gaston DEFFERRE (maire de Marseille, reprŽsentant l'aile
sociale-dŽmocrate de la SFIO).
La tentative de regroupement des forces
politiques non communistes, qui va du Parti socialiste SFIO au MRP, Žchoue
entre autres, sur la question de l'Žcole libre. Le concept de Grande FŽdŽration
est vite enterrŽ et DEFFERRE retire sa candidature.
Franois MITTERRAND (C.I.R.) se dŽclare
candidat, recevant le soutien de la SFIO, des radicaux, et de personnalitŽs
comme MENDéS FRANCE (qui ont constituŽ la FGDS) (2) et du PSU. Le 21 septembre,
il dŽclare: "Contre le rŽgime du pouvoir personnel, il faut recrŽer la
rŽpublique des citoyens". Mais, fait important, le Parti communiste avec
Waldeck ROCHET (nouveau secrŽtaire gŽnŽral) appuie cette candidature bien
qu'aucun accord de programme n'existe (les "rŽalistes" l'emportant
sur les "doctrinaires").
Pour le Centre, P. PFLIMLIN ayant
dŽclinŽ l'offre, et aprs le refus d'Antoine PINAY (IndŽpendants), Jean
LECANUET, 45 ans, ancien prŽsident du MRP, sera candidat et dŽfendra les thses
europŽennes qui constituent le diffŽrend entre ces formations politiques (en
dŽclin) et de GAULLE. SurnommŽ "dents blanches" il crvera les Žcrans
de tŽlŽvision, rŽvŽlant d'une manire incontestable l'importance de ce mŽdia
sur la vie publique.
Ë l'extrme droite le candidat est
Ma”tre TIXIER-VIGNANCOUR, qui tente de "rŽcupŽrer" les rapatriŽs
d'AlgŽrie (3).
Aprs avoir entretenu le suspense, le
prŽsident de la RŽpublique Charles de GAULLE (4) se prononce le 4 novembre, et
on traduira sa dŽclaration de candidature par la formule lapidaire : "Moi
ou le chaos".
L'originalitŽ de la campagne tient ˆ
l'impact de la tŽlŽvision, maintenant largement rŽpandue dans les foyers, et
que nŽglige DE GAULLE, comme d'ailleurs les sondages qui font leur apparition.
Pour la premire fois, les Franais
entendent un autre langage et dŽcouvrent le dynamisme de MITTERRAND et
LECANUET, le tribun TIXIER-VIGNANCOUR, le sŽrieux de MARCILHACY, et la bonhomie
d'un candidat "folklorique", Marcel BARBU.
Le contexte politique est calme durant
cette annŽe 65 et les rŽalisations non nŽgligeables.
RŽsultats (1er tour) :
Banyuls DŽpartement MŽtropole
Inscrits:
2632 (+ 104 / nov 62) 162.867 28.233.137
Abst.: 438 (16,65%) (19,22%)
(14,98%)
Votants: 2194
(83,35%) (80,78%)
(85,02%)
Blancs: 20 ( 0,91%) ( 1,27%)
( 1,02%)
S.Expr.
2174 (82,60%) (79,76%)
(84,14%)
MITTERRAND: 935 (43,00%S.E) (40,80%
S.E) (32,23%
S.E)
DE GAULLE: 781 (35,92% --) (34,76% --) (43,71%
--)
LECANUET: 274 (12,60% --) (11,83% --) (15,85%
--)
TIXIER-VIGN.: 134 ( 6,16% -- ) (10,35% --) ( 5,27% --)
MARCILHACY: 37 (1,70% -- ) ( 1,35% --) ( 1,73% --)
BARBU: 13 ( 0,59 % --) ( 0,86% --) ( 1,16% --)
Remarques :
Les abstentions sont parmi les plus
faibles, ˆ peine supŽrieures au record atteint lors du rŽfŽrendum de 1958. Ceci
est vrai ˆ Banyuls (+2,8%), mais en baisse pour le dŽpartement (-1,08%) et pour la mŽtropole (-0,62%).
Les bulletins blancs ou nuls sont plus
ŽlevŽs depuis quelques Žlections, mais leur signification demeure obscure
compte tenu de l'Žventail des candidats (sauf l'absence de candidats
Žcologiste, du PSU et royaliste).
MITTERRAND arrive en tte ˆ Banyuls, ce
qui ne constitue pas une surprise, mais avec un score relativement ŽtriquŽ,
correspondant aux seuls communistes, socialistes (SFIO + "Alduystes")
et quelques radicaux (= 964 voix ˆ la lŽgislative de 1962).
DE GAULLE progresse nettement par
rapport ˆ son reprŽsentant dŽpartemental de 1962 (+333 voix), mais moins que
lors du rŽfŽrendum sur le mode d'Žlection du prŽsident (-137 correspondant ˆ
des Žlecteurs modŽrŽs et . . . autres). Au plan national la situation est
diffŽrente puisqu'il fait le pourcentage de MITTERRAND ˆ Banyuls.
LECANUET fixe les Žlecteurs MRP (non
structurŽ ˆ Banyuls, sinon les voix catholiques) et du centre droit. Sur le
plan national son score est loin d'tre nŽgligeable, et est responsable du
ballottage du GŽnŽral, qui aurait pu dŽpasser la barre des 50 %.
TIXIER-VIGNANCOUR recueille les voix des
"pieds noirs" (surtout ˆ Perpignan, comme le montre son score
dŽpartemental) peu importantes ˆ Banyuls, et o se manifeste la prŽsence d'une
droite nationaliste ("La Corrze avant le Zambze", aprs avoir ŽtŽ
le chantre "de Dunkerque ˆ Tamanrasset").
Aucun candidat n'ayant obtenu la
majoritŽ absolue, les deux candidats arrivŽs en tte se reprŽsentent.
Le ballottage n'est pas une surprise du
fait de la non-campagne de DE GAULLE, et des ardeurs de LECANUET et MITTERRAND.
Compte tenu du fort taux de
participation prŽvisible, tout se jouera au second tour sur la
"ventilation" des voix de LECANUET.
La campagne devient plus ‰pre,
mobilisant . . . les artistes de la chanson et les sportifs, lesquels se
rŽpartiront dans chaque camp.
Jean MONNET, le pre de l'intŽgration
europŽenne, appelle ˆ voter MITTERRAND . . . ainsi que toute l'extrme droite
(par vengeance ?!), y compris un certain . . . Pierre SERGENT !. Quant ˆ
LECANUET, afin d'Žviter l'Žclatement du MRP, il se contente de parler de
l'Europe unie et de l'Alliance atlantique ( thmes peu gaulliens).
Un renfort inattendu (ˆ peine) avant le
premier tour Žtait venu . . . de Moscou pour soutenir, non le candidat soutenu
par le PCF, mais DE GAULLE (l'homme de "l'Europe de Brest ˆ É
l'Oural") dont le bilan en politique extŽrieure est jugŽ globalement
positif (5). Ce qui est vrai pour le
spectaculaire, mais moins en ce qui concerne le commerce extŽrieur (Qu'est
devenue "la mano en la mano" de Mexico au mois de mars de l'annŽe
prŽcŽdente?).
Au cours de trois entretiens avec Michel
DROIT ˆ la tŽlŽvision, de GAULLE corrige les erreurs du premier tour, et vise
naturellement les Žlecteurs de LECANUET, d'o sa rŽaliste mais curieuse formule
: "il ne suffit pas de sauter sur sa chaise comme un cabri et de crier
Europe ! Europe ! pour que tous les problmes soient rŽglŽs".
Franois MITTERRAND se prŽsente comme le
candidat de tous les rŽpublicains (6), non l'otage du PCF, et paradoxalement
son jeune ‰ge (49 ans) fait oublier qu'il est l'un des vieux routiers de la IVe RŽpublique et ancien ministre de la Justice dans le
gouvernement de Guy MOLLET en 1956.
RŽsultats (2 me tour) :
Banyuls DŽpartement MŽtropole
Inscrits:
2632 (+104 /nov 62) 162.797 28.223.198
Abst.: 447 (16,99%) (18,22%) (15,45%)
Votants: 2185
(83,01%) (81,78%) (84,50%)
Blancs: 33 ( 1,51%) ( 2,90%) ( 2,79%)
S.Expr.: 2152
(81,76%) (79,57%
) (
82,15% )
Mitterrand: 1279 (59,43% S.E) (57,52%
S.E) (45,50%
S.E)
De Gaulle: 873 (40,79% --) (42,48%
--) (54,50%
--)
Remarques :
Les abstentions sont ˆ peine plus
ŽlevŽes qu'au premier tour aussi bien ˆ Banyuls (+0,34%) qu'en mŽtropole
(+0,52). Par contre elles sont en diminution dans le dŽpartement (-1%).
MITTERRAND gagne +344 voix sur le 1er
tour, par gain d'abstentionnistes du 1er tour qui remplacent une partie des
voix de TIXIER-VIGNANCOUR + LECANUET (408) qui ont dž s'abstenir, ou voter en
partie pour DE GAULLE.
DE GAULLE progresse de 97 voix, il n'a
donc bŽnŽficiŽ que d'une trs faible partie des voix des trois autres candidats
(445).
Et pourtant le total indiquerait bien
que les voix de ces candidats se sont bien reportŽes au second tour : 344 + 97
= 441.
Seul un examen des cahiers d'Žmargement
pourrait rŽsoudre la question des transferts de voix.
S'il y a eu un chassŽ-croisŽ de 10% des
inscrits, ce sont 263 Žlecteurs qui seraient venus voter au second tour.
La gauche est minoritaire au 1er tour ˆ
Banyuls (935 contre 1126), et le second tour peut n'tre qu'une illusion, mais
il y a bien eu renfort par des abstentionnistes du 1er tour.
Notons que les Žlus dŽpartementaux de la
gauche n'ont pas brillŽ par leur zle en faveur de MITTERRAND.
Conclusion :
Si DE GAULLE est de nouveau Žlu pour 7
ans, cette Žlection apporte de nombreux enseignements.
Le r™le de la tŽlŽvision devient
considŽrable, et peut tre redoutable pour certains des candidats.
Le PrŽsident "sortant"
appara”t bien comme la clŽ de vožte de l'exŽcutif (et subit alors directement
les critiques rŽservŽes gŽnŽralement ˆ son Premier ministre). Il appara”t aussi
comme le chef d'une majoritŽ parlementaire.
La candidature de MITTERRAND constitue
l'amorce d'une union de la gauche non communiste (La FGDS n'est encore qu'une
fŽdŽration de partis, mais la rŽussite de son candidat en fera un leader
incontestŽ et il en deviendra le prŽsident).
Le soutien du PCF n'est pas suffisant
tant que DE GAULLE est au pouvoir.
Le Parti radical ne constitue plus une
force politique suffisante, tandis que le centre droit (Centre DŽmocrate,
reprŽsentŽ par l'ex-MRP: europŽen, libŽral, et pour l'Žcole libre) auquel
s'associe le CNI, s'affirme.
Le
"poids" de l'exŽcutif (et des technocrates) appara”t trop pesant, et
si l'amŽlioration du niveau de vie se poursuit, une morositŽ existentielle
diffuse existe. La modernisation comme le centralisme ont leur cožt.
Enfin les jeunes Žlecteurs (ˆ vrai dire
encore peu nombreux) n'ont pas le mme mythe du gaullisme que leurs a”nŽs.
Un voile pudique entoure les dŽpenses de
ce type de campagne Žlectorale : la dŽmocratie n'est pas encore devenue hors de
prix! comme elle le deviendra ultŽrieurement (ce qui entra”nera des partis
politiques et divers chefs d'entreprise ˆ commettre des abus de biens sociaux).
Notes annexes :
(1) Cf.
"L'Express" L'aventure du vrai. Edit. Albin Michel (1979)
(2) CrŽŽe en novembre 1965 afin de
regrouper la gauche non communiste (Convention des Institutions rŽpublicaines,
Parti Socialiste SFIO, Parti Radical). Cf. France MOLTERRIéRES In "Politique aujourd'hui",
N¡3, mars 1969.
(3) Ancien SecrŽtaire ˆ
l'Information (sic) sous Vichy. Rappelons qu'en tant qu'avocat il a plaidŽ lors
des procs des chefs de l'OAS. Cf. TIXIER-VIGNANCOUR, des RŽpubliques des
justices et des hommes, mŽmoires. Edit. Albin Michel (1976)
(4) Elu par un collge Žlargi ˆ 80
000 grands Žlecteurs le 8 janvier 1959, pour sept ans. Cf. Gilbert
GUILLEMINAULT. Le roman vrai de la Ve RŽpublique, L'Etat c'est lui 1959-1960. Edit. Julliard
(1980).
(5) : Notons que de GAULLE dŽveloppe
une force de frappe nuclŽaire indŽpendante, et critique la politique militaire
des USA au Vit-nam.
(6) Sa prise de position ds 1958
contre le retour du gŽnŽral de GAULLE au pouvoir et la publication de son livre
"Le coup d'Etat permanent" (1964 ) ont facilitŽ les ralliements ˆ sa
candidature. Ouvrage qu'il sera quasi impossible de se procurer par la suite.
On oubliera aussi le vrai-faux attentat du jardin de l'Observatoire
(16/10/1959) auquel il se serait prtŽ au dire de "Rivarol" (22/10).
TIXIER-VIGNANCOUR et LE PEN l'accuseront d'avoir ŽtŽ de connivence avec ses
"pseudo-tueurs". Il sera dŽfendu par Ma”tre Franois SARDA (7).
Beaucoup pensaient alors que son avenir politique Žtait dŽfinitivement
compromis ("Le Monde" du 28/10). La politique, comme la science, est
une longue patience, comme aurait pu l'exprimer le cŽlbre naturaliste Georges
LECLERC DE BUFFON s'il avait ŽtŽ notre contemporain.
(7) Avocat honoraire au Barreau de
Paris, ancien maire de Camp™me dans les PyrŽnŽes-Orientales, auteur d'un
ouvrage remarquable sur "Les ARAGO, Franois et les autres". Edit.
Tallandier (2002).
26 - LŽgislatives des 5 et 12
mars 1967
Dans le courant de l'annŽe 1966,
toujours sous le troisime gouvernement POMPIDOU, on assiste ˆ une
clarification des forces politiques .
L'Union pour la Ve RŽpublique comprend, outre l'UNR, les RŽpublicains
indŽpendants de GISCARD D'ESTAING (qui, suite aux critiques concernant son Plan
de stabilisation d'avant 1965, a ŽtŽ remplacŽ par Michel DEBRƒ) (1).
Si la politique Žconomique est plus
volontariste, la politique sociale marque le pas.
Dans le domaine europŽen, la situation
s'est dŽbloquŽe (compromis de Luxembourg avec la rgle de l'unanimitŽ). Gr‰ce
au talent d'Edgar FAURE (nouveau ministre de l'Agriculture) des accords sont
intervenus sur la politique agricole.
Le plus spectaculaire est cependant le
retrait de la France de l'OTAN le 21 fŽvier 1966, bien que demeurant toujours
dans l'Alliance atlantique. L'indŽpendance militaire de la France est affirmŽe
(doctrine tous azimuts), comme d'ailleurs sa diplomatie (relations avec l'URSS,
discours de Pnom-Penh).
La FGDS a tentŽ de rŽagir en constituant
un contre-gouvernement (ˆ la mode britannique) qui n'enthousiasmera pas les
masses. Il a rendu public son programme le 14 juillet. Aucun accord de fond
n'est passŽ avec le PCF, dont le dŽsaccord en politique Žtrangre est bien
apparu lors du dŽp™t d'une motion de censure par le groupe socialiste en avril
sur l'OTAN justement.
Le PCF par la voix de Georges MARCHAIS,
son secrŽtaire gŽnŽral, annonce qu'il prŽsentera des candidats dans toutes les
circonscriptions.
Un accord de dŽsistement est passŽ entre la FGDS et le PCF, en
faveur du candidat de gauche le mieux placŽ pour le second tour. Si la FGDS est
prte ˆ favoriser un centriste contre un gaulliste, le PCF lui s'y oppose.
Pour
l'opposition, l'accent est surtout mis sur les problmes Žconomiques et sociaux
(consŽquence du "plan de stabilisation" de GISCARD D'ESTAING), alors
que, pour la majoritŽ "gaulliste", on insiste une fois de plus sur la
dŽfense des institutions de la Ve RŽpublique
et les divisions des adversaires (2) (la majoritŽ s'intitule : ComitŽ d'action
pour la Ve RŽpublique).
Si POMPIDOU est en premire ligne tout
au long de la campagne, de GAULLE intervient Žgalement.
Dans la 1re Circonscription quatre
candidats et leurs supplŽants se prŽsentent :
1 - Pour le PCF : Joseph ALBERT et
Narcisse PLANAS (maire d'Elne).
2 - Pour l'URDS (Union des rŽpublicains,
des dŽmocrates et des socialistes) : Paul ALDUY (dŽputŽ sortant) et Jean MARTI
(maire de Cerbre, SFIO).
3 - Pour l'Union Ve RŽpublique : AimŽ FA et Henri BOUADA.
4 - Liste de large Union rŽpublicaine
(libŽraux) : Edouard RAMONET, radical dissident que personne ne conna”t (sinon
les curieux: il fut secrŽtaire d'ƒtat ˆ l'Industrie et au Commerce dans le 1er
gouvernement DE GAULLE en juin 1958, lequel, la veille de l'investiture du
GŽnŽral aurait dit " si DE GAULLE est Žlu prŽsident du conseil, je prends
le maquis"!). Il tente de regrouper les radicaux, les libŽraux, les
indŽpendants et les socialistes. Dernier point qui lui vaudra, lors de sa
rŽunion ˆ Banyuls salle Novelty, les foudres de Fernand PAULI . . . et son
dŽpart prŽcipitŽ vers d'autres
lieux avec ses gardes du corps (qui n'avaient pas dŽposŽ leurs armes au
vestiaire!) sous les quolibets du public.
La campagne comme il est d'usage, se
dŽroulera plus dans "L'IndŽpendant" que sur les estrades.
ALBERT appelle les socialistes SFIO ˆ ne
pas voter pour ALDUY, "ce corps Žtranger au socialisme", alors
qu'ALDUY s'Žtonnera que le PCF n'ait jamais votŽ de motion de censure contre le
gouvernement POMPIDOU.
Quant ˆ M. FA, il dresse le bilan de
l'action du GŽnŽral depuis son retour au pouvoir.
Paul ALDUY ne recevra que trs
tardivement l'investiture de la FGDS et en fera peu Žtat.
RŽsultats (1er tour) :
Banyuls Circonscription MŽtropole
Inscrits:
2692 (+ 60 / 1965)
88.540 28.291.838
Abst.: 706 (26,22%) (25,60%) (19,10
%)
Votants: 1986
(73,78%) (74,40%) (80,90
%)
Blancs: 67 ( 3,37%) ( 3,64%) ( 2,10 %)
S.Expr.: 1919 (71,29%) (71,69%) (
79,20 % )
ALDUY: 659 (34,34% S.E) (40,53%
S.E)
ALBERT: 603 (31,42% --) (30,88
% --)
FA: 468 (24,38% --) (20,84
% --)
RAMONET: 189 ( 9,84% --) ( 7,73 % --)
MŽtropole:
PCF: 22,51% S.E; PSU: 2,12 % S.E; FGDS: 18,90 % S.E; Radicaux (non inclus ˆ la
FGDS): 1,32 % S.E; CD: 14,09 % S.E; ModŽrŽs: 1,94 % S.E; Union Ve RŽp.: 38,45% S.E; Extrme droite : 0,56 % S.E .
Remarques :
Comme on peut le constater le nombre des
inscrits s'accro”t d'une manire non nŽgligeable : +60 depuis les
prŽsidentielles de 1965 et +164 depuis la prŽcŽdente lŽgislative, traduisant
l'arrivŽe de la gŽnŽration d'aprs guerre (notons que la majoritŽ est toujours
ˆ 21 ans) et de retraitŽs qui rentrent "au pays" (ds 1962), plus
quelques "rŽsidenciers secondaires".
Les abstentions sont ŽlevŽes
(+9,57%/1965), mais beaucoup moins qu'aux lŽgislatives de 1962 (-13,06%). Les
Žlecteurs attendent-ils le second tour ou les candidats les ont-ils rebutŽs?
Ces abstentions sont plus ŽlevŽes que pour le pays (+ 6,5 %).
ALDUY arrive largement en tte dans la
circonscription, mais moins nettement ˆ Banyuls (+101 /1962), et fait le plein
des voix du second tour de 1962 (ˆ -32 voix prs).
Au plan national la FGDS retrouve au
mieux le score de 1962 de la SFIO + Radicaux + Clubs (Mitterrand).
Le PCF progresse ˆ Banyuls (+197/1962),
bŽnŽficiant sans doute des voix PSU, et fait mieux qu'au second tour de 1962
(+128).
En mŽtropole le succs est net, mais
modeste si l'on tient compte de l'accroissement des nouveaux Žlecteurs
inscrits. Avec 5 millions de voix il devient le second parti en France, juste
devant la FGDS + PSU (4,7 millions), mais loin derrire les gaullistes (8,5
millions).
Ainsi la gauche est majoritaire dans le
pays, mais dominŽe par le PCF, face aux seuls gaullistes.
Les centristes peuvent arbitrer le dŽbat
avec leurs 3 millions de voix (bien qu'ils ne retrouvent pas le score de
Lecanuet aux prŽsidentielles de 1965).
Les
gaullo-pompidoliens assurent leur succs, mais progressent peu ˆ Banyuls (+20
voix/ 1er tour de 1962), alors qu'en mŽtropole l'accroissement est plus ŽlevŽ
(+ 5,8 % S.E.).
Tandis
que dans le pays les dŽsistements rŽciproques entre la FGDS et le PCF
s'effectuent normalement, dans le dŽpartement le PCF refuse de se retirer,
estimant que Paul ALDUY n'a obtenu le label "FGDS" qu'in extremis, et qu'il est soutenu par tous les
"rŽactionnaires" de la droite, mais plus vraisemblablement par
reprŽsailles nationale contre quatre socialistes (seuls cas d'indiscipline) qui
ont refusŽ de se retirer face ˆ des communistes mieux placŽs. Mais l'intŽressŽ
le souhaitait-il ?
On assiste donc ˆ une
"triangulaire".
RŽsultats (2 me tour) :
Banyuls Circonscription MŽtropole
Inscrits: 2692
Abst.: 640 (23,77%) (23,27%) (20,30%)
Votants: 2052
(76,23%) (76,73%) (79,70%)
Blancs: 34 ( 1,66%) ( 2,66%)
S.Expr.: 2018
(74,96%) (74,69%
)
ALBERT 788 (39,04% S.E) (35,85%
S.E)
ALDUY 725 (35,92% --) (43,52%
--)
FA 505 (25,02% --) (20,62%
--)
Remarques :
Les abstentions ont reculŽ (-2,45 %),
ainsi que les bulletins blancs ou nuls, preuves de la mobilisation de
l'Žlectorat, ce qui est aussi vrai pour le reste du pays.
Surprise relative, le candidat du PCF
est en tte ˆ Banyuls, et gagne d'un tour sur l'autre +278 voix, provenant en
partie de la tendance SFIO de la FGDS (qui prŽfigure avant la lettre l'union de
la gauche qui s'Žtait rŽalisŽe lors des municipales prŽcŽdentes).
Paul ALDUY progresse de 66 voix, et
assure sa rŽŽlection assez confortablement sur l'ensemble de la circonscription. La somme PC + ALDUY =
1513, score supŽrieur ˆ celui de MITTERRAND aux prŽsidentielles (soit +234).
Une partie des voix modŽrŽes (324) se sont bien portŽes sur ce candidat plus
social-dŽmocrate que de rupture avec le capitalisme comme le rappellent encore
la DŽclaration de Principes et le Programme fondamental du Parti socialiste
SFIO.
L'Union Ve RŽpublique avec FA ne rŽalise qu'un modeste rŽsultat ˆ Banyuls (+ 37
voix), ce qui est bien infŽrieur ˆ celui de DE GAULLE (- 368), et recule mme
par rapport au 2 me tour de 1962 (-37 voix).
Dans le dŽpartement, les deux dŽputŽs
sortants conservent leur sige : Paul ALDUY (URDS-FGDS), et AndrŽ TOURNƒ (PCF)
qui devance Ma”tre Franois SARDA (gaulliste de gauche).
Conclusion :
Le scrutin majoritaire amplifie tout
dŽplacement de voix et le nombre des siges obtenus par les formations
politiques ne correspond pas ˆ leur score rŽel (comme dans une proportionnelle
intŽgrale).
A l'inverse de novembre 1962, c'est ˆ la
gauche que profite cette fois ce mode de scrutin.
Il est probable aussi qu'une erreur
tactique a ŽtŽ commise par les gaullistes ˆ l'issue du premier tour en clamant
un peu trop leur victoire assurŽe (Il est vrai qu'en mŽtropole la majoritŽ
obtient 62 Žlus sur 72 au 1er tour, et les simulations donnaient 280 siges sur
487). Il est alors possible que des Žlecteurs centristes aient voulu Žviter une
victoire trop nette des gaullistes .
La stratŽgie d'union de la gauche a
Žgalement jouŽ comme force d'entra”nement.
Quoi qu'il en soit la majoritŽ sortante
ne la conserve qu'ˆ 7 siges prs (gr‰ce ˆ l'apport des circonscriptions
d'outre-mer), et surtout doit-elle compter sur le petit groupe des RŽpublicains
indŽpendants de Valery GISCARD D'ESTAING (3).
Le PCF a 73 dŽputŽs (+32); la FGDS : 121
(+16) avec 76 SFIO, 24 Radicaux et 16 Convention des Institutions
rŽpublicaines; Progrs et DŽmocratie moderne: 41 (-14) ; UD Ve (UNR-UDT)
: 200 ; R.I : 44 (+9).
Aprs l'Žlection de CHABAN-DELMAS ˆ la
prŽsidence de l'AssemblŽe nationale, un nouveau gouvernement POMPIDOU (le
quatrime) est formŽ.
Notes annexes :
(1) Cf. Michel DEBRƒ: Gouverner
autrement 1962-1970. MŽmoires 4. Edit. Albin Michel (1993)
(2) Ce qu'exprimera Ma”tre Franois
SARDA dans "L'IndŽpendant" (30/5) : La Paix et la Gauche.
(3) GISCARD D'ESTAING tout en
restant dans la majoritŽ marque ses distances en prŽconisant le "oui. . .
mais" ˆ l'Žgard de la politique gouvernementale. DE GAULLE, lui rŽpliquera
que l'on ne gouverne pas avec des "mais".
27 - Cantonales du 24 septembre
1967
Trois candidats se prŽsentent : Gaston
PAMS (maire d'Argels-sur-Mer, conseiller gŽnŽral sortant et sŽnateur), sous
l'Žtiquette de la FGDS regroupe socialistes et radicaux, Robert GAZAN (maire de
Villelongue-dels-Monts) pour le PCF, et AimŽ FA pour l'UD V e RŽpublique (gaullistes).
RŽsultats :
|
Banyuls |
Port-Vendres |
Collioure |
Cerbre |
Inscrits |
2692 |
3207 |
1847 |
1268 |
Abst. |
1646 (61,14%) |
2036 (63,48%) |
1011 (54,74%) |
793 (62,53%) |
Votants |
1046 (38,86%) |
1171 (36,52%) |
836 (45,26%) |
475 (37,47%) |
Nuls |
31 (
2,96%) |
75 ( 6,40%) |
31
( 3,71%) |
25 ( 5,26%) |
S.Expr. |
1015 (37,70%) |
1096 (34,18%) |
805 (43,58%) |
450 (35,49%) |
|
|
|
|
|
PAMS |
562 (55,36%) |
702 (64,05%) |
508 (63,11%) |
240 (53,33%) |
GAZAN |
294 (28,96%) |
230 (20,99%) |
150 (18,63%) |
161 (35,78%) |
FA |
159 (15,67%) |
164 (14,96%) |
147 (18,26%) |
49 (10,89%) |
Remarques
:
Comme cela Žtait prŽvisible, Gaston PAMS
est rŽŽlu ds le 1er tour (4489 voix) avec 62,65% des S.E., 25,59% pour R. GAZAN (1833 voix), et
11,76% ˆ A. FA (843 voix).
A Argels G. PAMS fait 1326 voix sur
1826 S.E. (72,62%), alors qu'ˆ Villelongue R. GAZAN fait 145 voix sur 159 S.E.
(91,19%).
Malheureusement comme toujours pour ce type d'Žlection, les abstentions sont trs ŽlevŽes dans le canton: 7426 votants pour 15 818 inscrits, soit 53,06%.
Le nombre des bulletins blancs ou nuls est
de 261, soit 3,51% des votants.